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À LA PRINCESSE MARIE.

STANCES.


 
Certes, chacun le sait, la froide indifférence,
De son souffle glacé flétrit tout aujourd’hui ;
Le cœur reste insensible à la peine d’autrui ;
Et ce siècle d’essais, de lutte et de souffrance,
N’a de tant de travaux encor gardé pour lui
Qu’un doute amer, enfant de son expérience.

Tous les jours désormais, du triste front humain,
Se détache un rayon de la sainte auréole ;
Tous les jours de nos cœurs une flamme s’envole ;
Chacun, de son côté, lutte avec le destin.
Pour ceux que la douleur abat sur le chemin,
Nous n’avons ni soupirs, ni larmes, ni parole.

La douleur ! et qui croit à la douleur encor ?
Qui croit à la tristesse, à la mélancolie ?
On nomme illusions ces anges de la vie
Qui seuls savaient pourtant le chemin du Thabor ;
Et l’homme dans son sein, où la veine est tarie,
Sous la source des pleurs creuse la mine d’or.