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GLASGOW.

tion, et soit restée intacte lors de la réforme. John Achaius, évêque de Glasgow, jeta les fondemens de cette église en 1123 ; mais il n’y mit pas la dernière main. Les différens styles d’architecture du monument confirment nos doutes et prouvent qu’il n’a guère été terminé qu’un siècle et demi au moins après avoir été commencé. Les cryptes, par exemple, sont de l’époque d’Achaius, de l’époque de la transition du roman orné ou fleuri au gothique lourd. Ces cryptes ont cent huit pieds de long sur soixante-douze de large. Quarante fenêtres ou soupiraux donnent du jour à ces souterrains divisés en trois galeries. Soixante-neuf stalles, pouvant contenir chacune de six à huit personnes, sont disposées le long de ces galeries ; cette partie de l’église s’appelle barony kirk, ou bien encore, le cimetière voûté. C’est là que son fondateur, saint Mungo, fut enterré. Soixante piliers de huit pieds de circonférence et de seize pieds de hauteur au plus, aux chapiteaux grossièrement travaillés, soutiennent des voûtes ogivales, obtuses et fort basses. Il y a loin encore de là aux hardiesses du gothique pur. Le chœur de l’église est évidemment de l’âge suivant, de 1160 à 1260 ; c’est le gothique simple et peu orné. L’angle de l’ogive des fenêtres, surtout des fenêtres des deux étages supérieurs, devient plus aigu ; les voûtes sont plus élevées, et les meneaux des fenêtres plus délicats et plus élancés. La partie antérieure de l’église nous paraît d’une époque encore moins reculée. Cette partie de l’édifice a dû être achevée vers 1260 ; ce n’est pas encore le gothique orné, mais l’ouvrier est devenu plus habile. On remarque déjà, dans cette partie de l’église, des prétentions à la légèreté et à la richesse surtout dans les grandes fenêtres placées au-dessous du clocher. Quoi qu’il en soit, l’ensemble de l’édifice paraît d’une extraordinaire simplicité. Sa masse solide n’est pas soutenue en dehors par des forêts d’arcs-boutans, arc-boutés eux-mêmes, comme dans les légers édifices de l’âge suivant, où tout a été sacrifié à l’effet hardi de l’intérieur. Ce ne sont point là non plus les délicatesses de la chapelle d’Holy-Rood et de Melrose-Abbey ou de la chapelle de Roslin, ces chefs-d’œuvre du gothique fleuri. Le clocher de l’église est tout-à-fait postérieur au reste du monument, il date de 1430 ; mais, comme l’artiste s’est efforcé de mettre son architecture en harmonie avec celle du reste de l’édifice, on n’y voit pas ces riches ornemens au dessin tourmenté et flamboyant (tracery) qui distinguent les monumens de cette époque. Ces ornemens ne se font remarquer que dans les galeries et les clochetons placés au haut de la tour et à la base de la pyramide qui termine le clocher. La hauteur du clocher, la tour et la pyramide comprises, est de 225 pieds.

Walter Scott, dans son roman de Rob-Roy, nous a laissé une admirable description de l’intérieur de la cathédrale de Glasgow, de ses cryptes mystérieuses, de ses innombrables tombes, dont les inscriptions n’ont pu sauver de l’oubli les restes des puissans dans Israël. L’extérieur imposant de l’édifice, le cimetière qui l’environne, les collines chargées d’antiques et noirs sapins qui l’ombragent, et jusqu’au ruisseau voisin dont le murmure monotone ajoute quelque chose de lugubre et de solennel à l’effet du paysage,