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POÈTES ET CRITIQUES LITTÉRAIRES DE LA FRANCE.

Leurs caresses s’entendirent,
L’écho ne fut pas discret :
Tous les antres les redirent
Aux nymphes de la forêt.

Soudain, pleurant leur outrage,
Elles vont, d’un air confus,
S’ensevelir sous l’ombrage
De leurs bois les plus touffus.
 


La galanterie spirituelle et vive de Parny, et sa mythologie de Cythère, n’avaient guère accoutumé la muse légère du XVIIIe siècle à cette plénitude de ton, à cette richesse d’accent. Au sein d’un zéphyr qui semblait sortir d’une toile de Watteau, on sent tout d’un coup une bouffée d’Homère :

De fleurs l’Ida se couronne,
Junon cède au roi des Dieux !

Fontanes avait aussi ses retours d’Hésiode : il vient de peindre la Vénus-Junon ; il n’a pas moins rendu, dans un sentiment bien richement antique, la Vénus-Cérés, si l’on peut ainsi la nommer ; c’est au huitième chant de la Grèce Sauvée :

Salut ! Cérès, salut ! tu nous donnas des lois ;
Nos arts sont tes bienfaits : ton céleste génie
Arracha nos aïeux au gland de Chaonie ;
Et la Religion, fille des Immortels,
Autour de ta charrue éleva ses autels.
Par toi changea l’aspect de la nature entière.
On dit que Jasion, tout couvert de poussière,
Premier des laboureurs, avec toi fut heureux :
La hauteur des épis vous déroba tous deux ;
Et Plutus, qui se plaît dans les cités superbes,
Naquit de vos amours sur un trône de gerbes.

Ce sont là de ces beautés primitives, abondantes, dignes d’Ascrée, comme Lucrèce les retrouvait dans ses plus beaux vers : l’image demi-nue conserve chasteté et grandeur.

Vers 1812, Fontanes vieillissant, et enfin résigné à vieillir, eut dans le talent un retour de sève verdissante et comme une seconde jeunesse :

Ce vent qui sur nos ames passe
Souffle à l’aurore, ou souffle tard.