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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.
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30 novembre 1838.


Nous perdrions notre temps à parler des affaires publiques, des grandes questions de diplomatie, d’administration et d’économie sociale, qui rempliront la session de la chambre, si l’opposition laisse aux députés le loisir de s’occuper d’autre chose que de ses affaires personnelles. Qui nous écouterait ? N’y a-t-il pas quelque chose de bien plus important que nos négociations à Londres pour la Belgique ; des affaires bien autrement sérieuses que nos intérêts politiques et commerciaux en Orient ; des questions bien plus pressantes que la question des lins, que la question des sucres, que la situation des chemins de fer et l’amélioration des prisons ? Peut-il s’agir d’autre chose que de savoir si les doctrinaires seront ministres, et s’ils s’empareront du pouvoir en écartant toutes les opinions qui croient y marcher avec eux ou par eux ? Parlons donc de l’opposition des doctrinaires, ainsi que de la coalition dont ils sont l’ame, et parlons-en longuement.

La coalition nous dit d’abord par un de ses organes de la gauche, qu’il n’y a pas de coalition. Il n’y a donc, dit-elle, ni immoralité, ni duperie dans cette alliance des opinions les plus opposées, car ce n’est là qu’une rencontre fortuite. On marche, il est vrai, tous ensemble à l’assaut du pouvoir ; mais on ne s’est pas donné rendez-vous. Quant à s’entendre, on y avisera, une fois la ville conquise ; on se disputera le gouvernement quand le gouvernement sera par terre ; le principal est de le renverser promptement. On ajoute qu’une coalition qui ne veut que détruire n’est pas une œuvre immorale ; l’immoralité consisterait à aviser d’avance, et de concert, aux moyens d’épargner à la France la crise qu’on lui prépare.

À la bonne heure, nous le voulons bien ; et nous nous garderons de relever les ordres du jour successifs et pressans du parti doctrinaire, qui indique régulièrement, dans sa feuille officielle, la marche que doit suivre la coalition. Il n’y a donc pas de coalition. L’opposition anti-dynastique, le centre gauche et les doctrinaires tiennent le même langage sans se voir et sans se concerter, et il est d’une mauvaise foi évidente de venir rompre des lances contre