principe caché de la réforme est précisément ce qui éclate au grand jour dans les débats de la théologie d’outre-Rhin.
Ce système, qui dans le fond est le seul vraiment dangereux pour la croyance en Allemagne, remonte principalement à Origène. Ce grand homme admit un des premiers un double sens dans les faits racontés par le Nouveau Testament. Il reconnaissait la vérité historique de la plupart[1] des évènemens contenus dans les livres saints. Mais, selon lui, ces mêmes évènemens renfermaient, d’ailleurs, un sens mystique ; en sorte que ces deux vérités, l’une historique, l’autre morale, subsistaient à la fois. Tout le moyen-âge entra dans cette voie : les faits de l’histoire évangélique furent interprétés par les scolastiques, comme des espèces de paraboles, sans que pour cela on cessât de les tenir pour certains. Il n’en est pas moins vrai qu’un danger imminent couvait dans cette doctrine, puisque, après avoir spéculé sur des évènemens comme sur des figures, il n’y avait qu’un pas à faire pour s’attacher exclusivement au sens idéal, et que l’allégorie était toujours près d’absorber l’histoire. La lettre tue, mais l’esprit vivifie, voilà le principe d’Origène. Mais qui ne voit qu’à son tour l’esprit en grandissant peut tuer et remplacer la lettre ? Ceci est l’histoire de toute la philosophie idéaliste dans ses rapports avec la foi positive.
Si l’on fait attention à la théologie de Pascal, on découvre qu’elle penchait de ce côté, et que c’était le véritable abîme qui s’ouvrait devant lui. Dans le volume de ses Pensées, l’Ancien Testament n’est que figures. La loi, les sacrifices, les royaumes, voilà des emblèmes, non des réalités ; la vérité même, chez les Juifs, n’est qu’ombre ou peinture. Les Babyloniens sont les péchés, l’Égypte l’iniquité. Quand je relis ces pages, il me semble toujours voir un homme miner les fondemens de son palais pour s’y mieux établir ; car n’est-il pas certain qu’en transformant ainsi l’Ancien Testament, on est tout près d’altérer le nouveau ? et, si le mosaïsme n’est la vraie religion qu’en figure, qui m’empêche d’en dire autant du christianisme ? Ôtez à l’Évangile son fondement réel qui est dans l’ancienne loi, que reste-t-il ? Un symbole suspendu dans le vide. Assurément, les conséquences de cette théologie qui fut aussi, à certains égards, celle de Fénelon, n’eussent pas tardé à paraître en France[2] ; mais elles fu-