Page:Revue des Deux Mondes - 1838 - tome 16.djvu/536

Cette page a été validée par deux contributeurs.


RUY-BLAS
DRAME DE M. VICTOR HUGO.

Nous sommes habitué depuis longtemps à voir M. Hugo traiter l’histoire de la façon la plus cavalière ; car depuis qu’il écrit pour le théâtre, il ne lui est pas arrivé une seule fois de respecter la tradition. Il se contente d’emprunter au passé le nom de ses principaux personnages, et ne consulte en les dessinant que sa fantaisie. Aussi, nous croyons-nous dispensé de répéter à propos de Ruy-Blas ce que nous avons déjà dit si souvent en jugeant les précédens ouvrages dramatiques de l’auteur. M. Hugo ignore, oublie, ou méprise l’histoire ; quelle que soit la conjecture à laquelle les spectateurs s’arrêtent, il est évident que l’histoire ne joue aucun rôle dans les drames de M. Hugo ; essayer de démontrer cette vérité serait perdre son temps, et faire injure au bon sens du lecteur. En parlant de Ruy-Blas, il faut donc laisser de côté toutes les querelles, toutes les intrigues qui se rattachent à la succession d’Espagne, à la déchéance de la maison d’Autriche, à l’avénement de la maison de Bourbon. Quoique M. Hugo n’oublie, dans aucune de ses préfaces, de compter Shakespeare parmi ses ancêtres, il ne se croit pas obligé d’imiter le respect de son illustre aïeul pour les affirmations de l’histoire. Un homme de guerre qui voudrait, à l’exemple de Marlborough, apprendre les grands évènemens du passé en assistant aux drames de M. Hugo, serait étrangement désappointé. Il sortirait du théâtre plus ignorant qu’un écolier de douze ans. Le mépris de l’auteur