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REVUE DES DEUX MONDES.

Le plan de cette Association de Crédit général réunit plusieurs idées fécondes, dont aucune n’est absolument neuve sans doute, mais qui le deviennent presque par leur combinaison. Quand l’Omnium sera devenu une réalité, ce sera le système de banque le plus complet en soi, et le plus étendu par ses ramifications, dont on ait jusqu’ici doté le monde industriel et commercial. Il y a bien en cela quelques côtés faibles, comme dans toute création humaine, et nous n’abdiquons pas ici la faculté et le devoir de les signaler un jour par une critique sérieuse, impartiale et surtout bienveillante ; mais l’idée fondamentale est bonne, la combinaison heureuse et fortement liée ; elle est praticable, elle sera réalisée, je ne dirai pas à quel moment ; mais il est bon que, dès aujourd’hui, elle se propage et se popularise.
Les fondateurs de l’Omnium, et M. de Ripert-Monclar, qui en a conçu la première pensée, ont vu que notre plus puissante association de crédit, la banque de France, ne parvient à faire accepter des billets de circulation que dans un rayon très court, qui ne dépasse guère les limites de Paris et de sa banlieue ; ils ont vu que, même avec le concours des trois ou quatre comptoirs récemment fondés par elle dans autant de villes de province, et investis du droit et des provisions nécessaires pour acquitter directement ses effets de crédit, elle n’a pas pu obtenir pour ceux-ci, à une certaine distance de la capitale, un placement abondant et avantageux. Ils en auront conclu évidemment qu’il ne suffisait pas de couvrir la France et les états européens de succursales correspondantes à la banque de l’Omnium, mais que c’était à la nature même des effets de crédit qu’il fallait s’en prendre. En conséquence, ils ont attaché à ceux qu’émettra l’Omnium un intérêt modéré, il est vrai, mais satisfaisant, d’où résultera pour eux, nous le croyons volontiers, une circulation plus active et un accueil très favorable dans les localités les plus rebelles jusqu’ici à toute combinaison de banque.
Cette idée, qui n’est pas neuve, on le sait, mais sur laquelle on a bien fait de mettre la main, pour en éprouver une bonne fois la fécondité par une grande application, cette idée nous apparaît comme la base de tout le système proposé. On va voir comment toutes les autres conceptions en découlent.
Partant de cette donnée première, l’association centrale de l’Omnium, dont le siége est à Paris, s’occupe d’y organiser un comptoir général de France, lequel constituera, à son tour, dans nos grands centres d’industrie et de commerce, des comptoirs principaux ; et ceux-ci seront chargés, chacun dans sa circonscription particulière, d’établir des comptoirs de circulation dans les villes et les cantons où le besoin s’en fera sentir. La même organisation s’appliquera à l’étranger, et il y aura successivement, à mesure que le système s’acheminera vers une réalisation plus ou moins étendue, un comptoir général de Hollande, un comptoir général de Suisse, de Lombardie, de Russie, etc. Nous n’insisterons pas davantage sur la description de ce mécanisme uniforme.
Les effets de crédit de l’Omnium se distinguent en effets de change et en effets de circulation. Ces derniers sont destinés uniquement à circuler sur toutes les places d’un même pays, et ne peuvent être présentés à l’acquittement que dans les comptoirs divers dont ce pays a été doté. Les effets de change doivent être acquittés à tous les comptoirs généraux que l’association a institués. Ne nous occupons que des effets de change ; on devinera aisément dans quelle mesure ce que nous avons à en dire s’étend aux effets de l’autre espèce.
L’association centrale transmet ses effets de change, en compte, et dans la proportion d’un crédit déterminé, à chaque comptoir général, qui use de cette monnaie de papier pour l’escompte des valeurs commerciales ou autres, et pour toutes les opérations ordinaires de banque.
Toutes les fois que cet effet de crédit de l’Omnium est échangé contre des valeurs à terme, il est expressément stipulé qu’on lui fixe une échéance au moins aussi éloignée que celle des valeurs qu’il représente ; il est possible d’en agir ainsi avec les cliens qui le prennent en paiement, car il porte intérêt, nous l’avons dit, et il offre d’ailleurs plusieurs garanties solides qui assurent la facilité de son acquittement au jour de l’échéance ; il peut, en raison de tous ses avantages, trouver, même avant d’être échu, mille personnes étrangères à l’Omnium qui l’accepteront sans inquiétude contre du numéraire, en toute circonstance. En outre, par ses traités avec les comptoirs, l’administration les a intéressés à toujours