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du 26 juin 1831 ou les 18 articles, acceptés par la Belgique avant la rupture de l’armistice et les malheurs du mois d’août. D’un côté, ils sont aujourd’hui sans valeur diplomatique, et de l’autre ils ne tranchaient pas si clairement en faveur de la Belgique la question territoriale, que ce soit la peine de les exhumer du milieu des projets et contre-projets enfantés par la conférence.

On me fait un autre reproche. On m’accuse de n’avoir pas tenu compte des sept années de retard, pendant lesquelles la Hollande a constamment rejeté le traité du 15 novembre, et de vouloir contre toute justice conserver une force obligatoire absolue à des stipulations non exécutées. Eh bien ! savez-vous ce que me reproche le Journal de La Haye, en même temps que M. de Mérode ? Précisément le contraire. On m’accuse, dans une dissertation ex-professo, de scinder arbitrairement le traité des 24 articles ; on entreprend de démontrer, contre ma première lettre, qu’ils forment un ensemble qui n’admet pas de partage, et que je n’entends rien au droit des gens, que je n’ai lu ni Vattel, ni Grotius ; que je suis d’une fort mauvaise école de publicistes, quand je demande, au nom de la Belgique, la révision des dispositions financières du traité. À ce double reproche, à ces accusations contradictoires, je ne serai pas embarrassé de répondre. Mais je vais pour cela invoquer un argument que les esprits tout d’une pièce ont toujours combattu et qui ne m’en paraît pas moins excellent, la nécessité politique. Quant à Vattel et Grotius, j’en fais bon marché, et je me tiens pour historien de bonne foi, plutôt que pour savant publiciste. Si donc je plaide pour le traité des 24 articles en ce qui concerne les arrangemens territoriaux, c’est qu’il ne me semble pas possible de résoudre autrement la question, à moins de faire comme les Belges, de n’en point embrasser tous les élémens, de se cantonner dans la nationalité et de laisser de côté les droits de la confédération, ceux de la maison de Nassau, les titres d’acquisition du Luxembourg par le roi des Pays-Bas, et l’état de l’Europe ! En sorte que j’irais volontiers jusqu’à dire que, si le traité était à refaire, on ne pourrait pas, sur le tout, arriver à un résultat très différent. Remarquez encore que le désavantage de l’inexécution par la Hollande a pesé tout entier sur celle-ci, que ses ports ont été bloqués, qu’une armée française l’a dépossédée violemment de la citadelle d’Anvers et en a fait la garnison prisonnière, tandis que la Belgique a conservé jusqu’à présent Venloo et autres places du Limbourg, et tout le Luxembourg, sans la forteresse. Cependant, si le roi Guillaume avait voulu rendre, en même temps que la citadelle d’Anvers, les forts de Lillo et de Liefkenshoek, le gouvernement belge aurait été dans l’obligation d’exécuter l’engagement qu’il avait pris d’évacuer les parties hollandaises du Limbourg et du Luxembourg[1].

Voyons maintenant les charges financières du traité sur lesquelles ma haute justice, comme dit M. de Mérode, accorde à la Belgique une réduction

  1. Convention de Londres du 22 octobre 1832 ; note de M. de Latour-Maubourg au général Goblet, ministre des affaires étrangères de Belgique, du 30 ; réponse du général Goblet, du 2 novembre, à minuit. — Nothomb, Essai, etc., 3e édition, pag. 280.