d’un lien fédéral, met à la discrétion de deux puissances les libertés civiles ou les libertés religieuses des Allemands ; admirez donc qu’en troc des cent cinquante mille Luxembourgeois Wallons, soustraits à cette ligue de compérage absolutiste, cent cinquante mille Limbourgeois soient, après sept ans de délai voulu par elle-même, transformés en Germains, pour que les marchés diplomatiques d’hommes balancent éternellement leurs échanges avec une arithmétique équité. Ô dérision ! Une attaque sub te, qui devait être dénoncée dix jours d’avance, modifie les articles préliminaires d’un traité conforme aux besoins et aux vœux des populations liées depuis quatre siècles ; et sept années de statu quo prolongé ne sauraient rompre des rapports inscrits pendant quinze ans dans un greffe où ils ont dormi sans se révéler par un seul acte à ceux qu’ils concernaient ! Oui, monsieur, si l’on en croit votre correspondant sur les affaires extérieures, tout arrangement de la question hollando-belge, qui n’indemniserait point la confédération germanique de la manière qu’elle veut être indemnisée, équivaudrait à la guerre, à cette guerre générale, dont personne ne veut ; mais encore, selon lui, faut-il que la chose en vaille la peine, et qu’en affaires comme en poésie dramatique, sit dignus vindice nodus. Eh bien ! en cela, il a raison, et je dis : Si pour la France, non est dignus vindice nodus, qu’elle abandonne les populations du Luxembourg et du Limbourg ! Mais pour prouver qu’elle ne le peut avec honneur, je citerai de nouveau celui que je combats.
« En protégeant de tout son pouvoir, dit-il, la séparation de la Belgique d’avec la Hollande, la France de juillet a poursuivi un résultat qui méritait que pour l’obtenir on courût le risque de la guerre. M. Molé ne s’y est pas trompé en 1830. Il s’agissait effectivement de rompre, sur une grande étendue de nos frontières, ce réseau de fer, cette ceinture compacte d’hostilités armées dans lesquelles nous avait enfermés le congrès de Vienne. Il s’agissait de détruire ou de neutraliser ces forteresses bâties avec notre argent et inspectées annuellement au nom de l’Europe, dont les canons n’étaient tournés que contre la France. Ce but a été atteint sans la guerre, mais son importance aurait justifié la guerre elle-même si elle était devenue indispensable. »
Voilà certes un éminent service rendu à la France en septembre 1830, œuvre de tous les Belges, y compris les habitans du Luxembourg, qui prirent une part active à ce changement, dont les députés siégeaient comme Belges aux états-généraux du royaume des Pays-Bas, et siégèrent encore comme Belges au congrès national de Belgique, qui prononça la séparation de la Hollande, ainsi que le trouvait bon M. Molé. Quand j’use de l’expression, service rendu à la France, ce n’est point afin d’écarter le souvenir de la protection française, ensuite nécessaire aux Belges ; l’amour-propre ingrat m’est trop odieux pour que j’oublie qu’une nation forte en a sauvé une plus faible incomplètement organisée. Mais l’égoïsme étroit serait-il moins ignoble que le défaut de reconnaissance ? Et puisque la France trouve son compte à la séparation de la Belgique de la Hollande, séparation qu’elle a obtenue sans guerre par le dévouement des Belges qui combattirent dans les murs de