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LIVINGSTON.

au moyen de l’instruction, si l’ignorance les y avait conduits. Par ce dernier perfectionnement, la loi, qui de vindicative était devenue juste, de juste devenait charitable ; elle ne châtiait pas seulement l’acte, elle réformait l’ame du criminel, et complétait l’art de punir par l’art de guérir.

Continuant les travaux de ses prédécesseurs, M. Livingston a embrassé par la pensée et compris dans son ouvrage toute la législation pénale, depuis les premières dispositions qu’elle doit prendre pour garantir la société, jusqu’aux résultats définitifs qu’elle doit atteindre en réformant les coupables. Il l’a divisée en quatre codes : code des crimes et des peines, code de procédure, code d’évidence, code de réforme et de discipline pour les prisons. Le titre de ces divers codes, dont chacun forme un ouvrage étendu et se trouve précédé d’une grande introduction, indique leur sujet et montre avec quelle habileté logique M. Livingston a procédé dans la distribution de son œuvre. Le code des délits et des peines expose avec clarté et définit avec précision toutes les offenses publiques contre l’état, sa souveraineté, ses divers pouvoirs, sa tranquillité, son revenu, son commerce intérieur et extérieur, la monnaie légale, la liberté de la presse, la santé, la morale, la propriété publique, les grandes routes, l’exercice de la religion, et toutes les offenses privées contre les individus, leur personne, leur réputation, leurs droits politiques et civils, leurs professions, leurs propriétés. Il détermine en même temps, d’après la nature du dommage qu’elles causent et le degré d’intention perverse qui les accompagne, les peines applicables à chacune de ces offenses. Dans ce double travail, il se montre observateur ingénieux, criminaliste savant et profond. Tout en suivant les grands principes de justice et d’humanité proclamés par le dernier siècle, les règles supérieures et les vues pratiques répandues dans nos codes, et les garanties individuelles accordées par la loi anglaise, il les applique à sa façon et avec originalité.

M. Livingston rejette tous les châtimens qui atteignent purement le corps et qui entretiennent et augmentent la dégradation de l’ame. Il n’admet ni le fouet en usage encore dans plusieurs pays et surtout dans le sien, ni les fers ni les boulets qui subsistent dans le nôtre, ni ces expositions publiques uniquement propres à endurcir ceux qui les subissent et à corrompre ceux qui les voient. Il admet encore moins la flétrissure de la marque, depuis lors heureusement enlevée de nos lois, qui perpétuait le déshonneur du crime après son expiation ou son pardon, et conduisait presque forcément à la récidive.