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REVUE DES DEUX MONDES.

L’année suivante, Geiier vint à Stockholm, et entra dans l’intimité de plusieurs hommes de distinction. Puis il prit un nouveau grade à l’université et voyagea en Angleterre. En 1810, il fut de nouveau couronné par l’académie. En 1811, il devint l’un des membres les plus actifs de la société de l’Iduna, qui publiait un journal dans le but de réveiller le goût de l’ancienne littérature scandinave et des anciennes chroniques. Geiier inséra dans ce recueil quelques poésies qui peuvent être mises au nombre des plus belles œuvres poétiques de la Suède. Il rendit un autre service en publiant, avec M. Afgelius, le recueil des chants populaires. L’introduction mise en tête de ce recueil est un morceau critique d’une grande portée[1]. En 1815, il fut nommé professeur d’histoire adjoint à l’université d’Upsal, puis professeur titulaire, et, dès cette époque, chaque année de sa vie a été marquée par quelque travail important.

Son grand ouvrage sur les chroniques de Suède fut publié en 1825[2]. C’est là qu’il a recueilli le fruit de ses études ; c’est là qu’il a montré toute sa sagacité d’historien. Il est remonté aux sources les plus lointaines et les moins connues ; il les a exposées, analysées, jugées avec une élévation d’esprit et une clarté d’aperçu qui laisse peu de place à la critique. Tout ce livre est un tableau sérieux, animé, complet, de l’ancien état de la Suède, de sa situation géographique, de ses lois, de ses mœurs, des indices primitifs de son histoire, des traditions poétiques et religieuses qui l’ont illustrée. M. Geiier voulait faire le même travail pour l’époque païenne et les époques suivantes ; mais il s’est aperçu qu’il l’avait pris sur une trop grande échelle. Il l’a abandonné, et il est à craindre qu’il ne puisse le continuer. En 1832, il publia le premier volume d’une histoire du peuple suédois[3], qui bientôt fut suivi de deux autres[4]. Mais cet ouvrage s’arrête à la mort de Christine. La Suède n’a point encore eu son histoire complète, et, s’il est un homme dont elle doive surtout la désirer et dont elle ait le droit de l’attendre, cet homme est Geiier.


X. Marmier.
  1. Svenska Folkvisor from Forntiden, 3 vol. in-8o, 1814-1816.
  2. Svea Rikes Hœfder, 1 vol. in-8o.
  3. Svenska Folkets Historia.
  4. Les trois premiers volumes de cette histoire ont été traduits en allemand, et font partie de la collection de Heeren. Ils ont été traduits en français par un jeune professeur de Toulouse, qui n’a pu, je crois, trouver un éditeur pour les imprimer. Il n’y a pas d’éditeur pour publier un ouvrage qui mériterait de devenir classique dans notre pays, comme il l’est en Suède ; mais il s’en présentera plusieurs pour mettre au jour quelque pitoyable résumé écrit avec une impertinente ignorance, plein de fautes et de lacunes. C’est ainsi qu’on étudie l’histoire.