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DES ÉTUDES HISTORIQUES DANS LE NORD.

Tandis que les philologues s’aventuraient ainsi dans ces grandes questions, quelques hommes moins ambitieux se bornaient à relater les faits les plus récens. Tegel écrit l’histoire d’Éric XIV, Werwing celle de Jean III, Norberg celle de Charles XII, Archenholt publie les Mémoires de Christine, et Puffendorf joint à son introduction générale l’histoire de Suède, en suivant, pour les temps anciens, le système de Magnus et de Loccenius[1].

Jusque-là il n’existait pas encore une histoire de Suède suivie et complète. Dalin entreprit cette œuvre importante. Il avait écrit un poème sur la Liberté suédoise, qui fit sensation[2]. Les états du royaume, le voyant disserter si facilement sur les époques d’absolutisme et les époques de constitution, ne crurent pouvoir mieux faire que de lui confier le soin d’écrire l’histoire du pays. Ils lui donnèrent, pour ce travail, 2,000 ducats, et le poète se mit à l’œuvre. La partie la plus importante de ce livre est celle où il expose l’ancienne situation de la Suède. Celsius avait établi que les eaux de la mer Baltique diminuaient chaque année. Dalin adopta le même système. Il essaya de démontrer par là que les géographes latins ne s’étaient pas trompés quand ils avaient décrit la Scandinavie comme une île ; que la Suède avait été primitivement non-seulement une île, mais une réunion de plusieurs îles. À l’appui de ses assertions, il pouvait citer des faits assez notables, des espaces d’eau évidemment rétrécis, des noms anciens qui indiquaient un golfe ou un port, là où il n’y a plus ni golfe, ni port, des rocs cachés autrefois sous les vagues et maintenant mis à découvert. Ce calcul géographique, qui anéantissait les fabuleuses théories des antiquaires du XVIIe siècle, causa une grande rumeur. Le monde savant se divisa en deux partis, et la question fut discutée de part et d’autre avec ardeur. Elle paraît être résolue aujourd’hui. Les observations des naturalistes de Suède, soutenues par celles d’un géologue célèbre, M. Lagell[3], ont démontré que Celsius et Dalin touchaient à la vérité. Les eaux ne diminuent pas comme Celsius l’avait dit, mais la terre s’élève à peu près d’un pouce chaque année. Dalin avait trouvé dans ce système topographique l’étymologie du nom de Suède. Comme cette contrée était de tout côté bordée par la mer, on l’appela Svea rike, de Siœrike

    Le quatrième volume fut mis sous presse en 1702. Il n’y en eut que trois feuilles imprimées. Le 16 mai, un incendie consuma l’imprimerie, le manuscrit de l’auteur et un grand nombre d’exemplaires du troisième volume.

    Le premier volume a été réimprimé en 1679. En 1696, on en publia en Allemagne une autre édition, mais en latin seulement.

    Un libraire de Rotterdam annonça, en 1726, une nouvelle édition de ce célèbre ouvrage. Son projet ne fut pas mis à exécution.

  1. Son ouvrage parut pour la première fois à Francfort-sur-le-Mein, en 1686. Il fut traduit en français et imprimé à Utrecht, en 1687 ; puis à Leyde, en 1710. En 1765, M. Lacombe publia un Abrégé chronologique de l’histoire de Suède, qui n’est autre chose qu’un extrait de l’introduction de Puffendorf.
  2. Svenska Friheten, Stockholm, 1742, in-4o.
  3. On the Proofs of a gradual rising of the land in certain parts of Sweden, in-4o, London, 1835.