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damné pour avoir publié une brochure dont toute la responsabilité morale ne pèse évidemment pas sur lui. Pour le ministère, il ne pouvait se soustraire à cet acte de vigueur ; et les journaux qui l’ont attaqué ont eu soin de ne parler que de la publication de la brochure, en écartant le fait de la distribution à dix mille exemplaires au peuple et à l’armée. Encore une fois, nous plaignons le condamné, et nous espérons qu’un jour on adoucira sa peine ; mais nous croyons que les esprits impartiaux approuveront le ministère. Nous ne parlons pas de ceux qui, l’accusant sans cesse de faiblesse, encouragent par ces accusations les tentatives du genre de celle qu’il a été forcé de réprimer d’une manière aussi péremptoire.

Si nous blâmions le ministère, ce serait d’un autre procès que de celui de M. Laity. Le journal le Temps avait publié sous la forme dubitative, et comme des bruits de ville, quelques détails sur la délibération de la cour des pairs. Le ministère, en faisant saisir ce journal, en lui intentant un procès au nom des lois de septembre, en usant d’un droit qu’il a incontestablement, a-t-il fait un acte de bonne politique ? Nous ne le croyons pas. Le Temps est un journal modéré, il a défendu le ministère pendant une grande partie de la session, il a servi de tout temps les intérêts de la dynastie actuelle. En 1830, en 1831, le Temps a rendu de véritables services. Est-ce pour de tels journaux qu’a été faite la législation de septembre ? Le Temps a commis, il est vrai, une infraction aux lois de septembre en publiant quelques détails de la délibération de la cour des pairs ; mais mille légères infractions aux lois de septembre n’ont-elles pas été tolérées depuis un an ? D’où vient donc cette rigueur excessive à l’égard du Temps ? Comme il n’est certainement entré dans la pensée d’aucun des ministres de faire sentir en cette occasion, au Temps, qu’il y a plus d’inconvéniens à attaquer le cabinet qu’à le défendre, nous dirons simplement au ministère qu’il a donné lieu à ses adversaires de lui supposer cette pensée. L’article du Temps eût passé inaperçu sans la saisie de ce journal. Cet article ne pouvait blesser ni le ministère, ni la cour des pairs. À quoi tend donc cette saisie ? Si l’on veut procéder logiquement, il faudra saisir, l’un après l’autre, dix journaux de l’opposition, et comme nous pensons que le ministère n’a pas décidé de se soumettre, en frappant la presse, aux sommations d’énergie que lui fait l’opposition, nous sommes persuadés que cette petite mesure de rigueur sera sans suite et sans conséquences de la part du cabinet. Nous n’hésitons pas à ajouter que notre désir est qu’il en soit ainsi devant les tribunaux, et que le Temps soit acquitté. Nous avons assez souvent approuvé les actes du ministère actuel, pour avoir le droit de blâmer, sans être taxés de partialité, ceux qui nous semblent impolitiques, et celui-ci est du nombre. Le ministère actuel est du 15 avril, et non du 6 septembre ; il ne doit pas l’oublier.

L’ordonnance de clôture de la session a été portée aux deux chambres. Le ministère a de grandes affaires à traiter dans l’intervalle des deux sessions, et peut-être d’importans et rigoureux devoirs à remplir sur lui-même. L’oppo-