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REVUE. — CHRONIQUE.

soient professés par un assez grand nombre pour former une majorité, prouvez-le en disant ces principes. Attaquez le ministère sur des faits. S’il a de coupables complaisances pour une influence extra-parlementaire, faites-le savoir. Cette complaisance se manifeste apparemment par quelques actes ; et vous ne pouvez les ignorer, puisque vous signalez cette complaisance : divulguez les actes. Vous dites que le pouvoir diminue ; en quoi diminue-t-il ? Blâmez-vous la politique extérieure ? Montrez-nous comment elle a failli, et en quelle chose. L’Espagne constitutionnelle est-elle plus en danger par le refus d’intervention qu’elle ne l’était au temps du ministère du 11 octobre ou du 15 avril ? L’alliance anglaise vous semble-t-elle affaiblie par l’ambassade du maréchal Soult ? Trouvez-vous des indices de désunion dans le dernier discours de lord Palmerston, où il reconnaît le droit de la France à s’asseoir d’une manière stable en Afrique ? La question d’Orient se présente. Le pacha d’Égypte veut son indépendance. Son grand âge, dit-il, lui fait une loi de se presser de secouer la suzeraineté de la Porte, dont il ne veut pas mourir le vassal. Que feriez-vous de cette question d’Orient ? De qui prendriez-vous la défense et la protection ? En quoi le ministère péchera-t-il, s’il prend l’un ou l’autre parti ? On est réellement un parti, une opinion, un camp politique, lorsqu’on parle un langage aussi net. On court alors effectivement la chance de saisir le pouvoir ; mais se renfermer dans de vagues généralités, demander le gouvernement représentatif, crier à l’abaissement et au rapetissement, ce n’est rien qu’une tracasserie qui ne mène à rien. Nous nous en rapportons au témoignage du pays tout entier, qui est si tranquille, tandis que l’opposition est si exaltée ; qui vaque tranquillement à ses affaires, qui commerce, qui récolte, qui jouit de sa paix, de son aisance et de sa liberté, tout comme si nous avions le gouvernement parlementaire, la présidence réelle, et tout ce que nous aurons infailliblement, dès que les cinq oppositions réunies auront composé et fait agréer un nouveau ministère de leur façon.

Le procès intenté à M. Laity devant la cour des pairs s’est terminé par une condamnation. La peine prononcée par la cour des pairs est bien rigoureuse. Un jeune homme, un jeune officier, condamné à cinq années de détention, et de plus, pour sa vie entière, à cette sorte de détention qu’on nomme surveillance de la police, c’est là sans doute une punition sévère. Mais M. Laity s’était exposé à une punition bien plus rigoureuse encore en prenant, à Strasbourg, les armes contre le gouvernement. Un intérêt réel s’attache à ce jeune officier qui a risqué de la sorte tout son avenir en faveur d’idées qu’il croit généreuses ; mais le ministère a fait son devoir. En traduisant l’accusé devant la cour des pairs, il a usé d’un droit que lui confère la législation. N’est-il pas curieux qu’il soit blâmé par les auteurs même de cette législation ? On parle de gouvernement constitutionnel. Dans sa courte existence politique, M. Laity en a éprouvé les avantages et les inconvéniens d’une manière bien éclatante. Acquitté par le jury quand il était sous le poids d’une accusation de révolte à main armée, acte qu’il ne niait pas, il a été con-