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ÉTABLISSEMENS RUSSES DANS L’ASIE OCCIDENTALE.

peu intéressés à ne pas trouver très concluantes les thèses de droit public que soutient M. Spencer en faveur de l’indépendance caucasienne. On risque fort, en prenant de semblables conclusions, d’être appelé par cet écrivain scribe mercenaire aux gages de la Russie[1] ; mais, en vérité, nous n’eussions jamais pensé sans son livre à étudier particulièrement la question circassienne ; c’est lui qui, par ses exagérations nous a converti à l’opinion contraire à la sienne, et nous craignons fort qu’il ne produise le même effet en France sur quiconque ne croit pas nos intérêts indissolublement liés à ceux de l’omnipotence anglaise sur les mers.

Nous décrirons prochainement, d’après le docteur Eichwald, les établissemens de la Russie sur la mer Caspienne et au sud du Caucase, et c’est alors seulement que nous nous occuperons des inquiétudes qu’inspire cette puissance à beaucoup d’esprits prévoyans, et que nous examinerons lequel des deux vaudrait le mieux pour l’Europe continentale : ou que le torrent moscovite s’écoulât en Asie, ou que la barrière du Caucase lui fût fermée, au risque de le faire refluer sur l’Occident. Nous retrouverons M. Spencer sur ce terrain, et nous nous en félicitons d’avance, car il est rare qu’il n’y ait pas quelque chose à apprendre avec lui.


E. de Cazalès.
  1. Hireling scribe of Russia est une qualification souvent appliquée par lui aux gens qui ne partagent pas sa manière de voir.