des détails, des secrets et des nuances qui peuvent se dérober longtemps même à une attention sincère. Quand Luther s’éleva contre l’église, le catholicisme avait perdu la confiance absolue de la société chrétienne et l’intelligence souveraine qui lui avait donné la force de la conduire ; s’il en eût été autrement, Luther n’aurait pu ni paraître, ni réussir. Mais ce fait, si considérable et si clair qu’il fût, ne pouvait suffire à trancher toutes les difficultés, pas plus qu’il ne suffit aujourd’hui à expliquer tous les évènemens. Le catholicisme, même à l’instant où il était nié avec audace et puissance, conservait une autorité qu’il ne devait pas perdre de si tôt. Les grandes forces mettent à s’éteindre autant de temps qu’elles en ont pris pour se former. C’est donc un curieux fragment de l’histoire de la papauté que le xvie et le xviie siècle, où le catholicisme déploie toutes ses ressources pour se maintenir, résister et se venger : il n’y a pas là l’unité des temps de Grégoire VII et d’Innocent III ; mais on y trouve les variétés, les oppositions de la vie et de la nature humaine. On peut convier à ce spectacle ceux qui s’imaginent que les grandes causes peuvent triompher ou périr tout-à-fait en quelques années, au gré de l’impatience et de l’égoïsme de quelques hommes et même de quelques générations.
Un fait honorable pour le catholicisme, et qu’il est juste de mettre d’abord en lumière, est la réaction intérieure qui, au commencement du xvie siècle, ramenait en Italie beaucoup d’hommes éminens à la spiritualité religieuse. L’excès de la liberté provoqua ce retour, car à Rome, sous Léon X, il était de bon ton de combattre les principes du christianisme. « On ne passait pas, dit P. Ant. Bandino, pour un galant homme, si l’on ne manifestait pas des opinions erronées ou hérétiques sur la religion. » On se moquait de l’Écriture et des mystères. Tant d’insultes ranimèrent dans Rome même l’esprit chrétien. Des hommes de distinction, dont plusieurs furent cardinaux plus tard, fondèrent à Trastevere un oratoire de l’amour divin, où ils se livraient à des exercices spirituels. Venise fut quelque temps le refuge de Romains et de patriotes florentins qui s’occupèrent, avec une piété sérieuse, de problèmes religieux, et notamment de la doctrine de la justification, ce grand objet des pensées de Luther. Savonarola n’est-il pas aussi un éclatant indice des désirs de rénovation qui fermentaient au sein du catholicisme italien ? Naples, Modène, virent publier un livre intitulé du Bienfait du Christ, où la justification était attribuée exclusivement à la grace. Enfin il y eut un moment où plusieurs catholiques romains crurent qu’une réconciliation était possible avec