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REVUE. — CHRONIQUE.

Quant à la France, loin de s’efforcer de prolonger un tel état de choses, il est de son intérêt qu’une question dont la solution aura lieu en quelque sorte à sa frontière, se trouve désormais clairement établie, et ses avis ne seront pas repoussés à Londres et à Bruxelles, comme affectent de le penser ceux qui, voulant rabaisser seulement le ministère, s’attaquent en réalité à l’honneur et à la dignité du pays.

On ne reprochera pas, du moins, à la marine française d’avoir été inactive cette année. Après l’affaire d’Haïti, nous avons l’affaire du Mexique ; puis viendra sans doute celle de Buenos-Ayres, qui paraît difficile à éviter. En aucun temps, on peut le dire, le gouvernement français n’a protégé plus efficacement son commerce extérieur et les droits de ses nationaux à l’étranger. C’est ainsi qu’une grande puissance s’attire le respect des autres nations, et la France peut prendre rang aujourd’hui près de l’Angleterre et des États Unis, les deux puissances navales qui ont obéi le plus fidèlement au principe de la défense des intérêts particuliers. La lecture des documens officiels publiés, il y a quelques jours, montre suffisamment de quel côté se sont trouvés l’esprit de justice, la patience et la modération. Ces qualités ne distinguent pas, en général, les gouvernemens des républiques américaines du sud, et particulièrement celui du Mexique. M. le baron Deffaudis, notre ministre plénipotentiaire près de cet état, retiré à bord de la frégate l’Herminie, au mouillage de Sacrificios, a parfaitement exposé les motifs de plaintes de la France. Ces griefs datent de plus de treize ans, et tout en rendant justice à l’énergie de la démonstration qui se fait en ce moment, on ne peut s’empêcher de remarquer que durant ces treize années, les sujets anglais établis au Mexique n’y ont pas été exposés à autant de vexations. Les Anglais, tous protestans, sont cependant l’objet d’une haine plus vive de la part du peuple mexicain que les Français, qui professent, en général, la religion catholique. Toutefois les intérêts d’aucun étranger n’ont été respectés dans les troubles dont Mexico a été si souvent le théâtre, et si les Français ont plus souffert que les autres des différens pillages du Parian, le bazar de cette place, c’est qu’adonnés particulièrement au commerce de détail, ils se trouvaient en plus grand nombre dans cet établissement. Les autres vexations subies par nos compatriotes sont du fait même du gouvernement mexicain, et M. Deffaudis les énumère une à une pour en obtenir la réparation. La France l’obtiendra de gré ou de force, et quelle que soit la voie où l’entraînera le gouvernement mexicain, elle lui aura donné une leçon dont il profitera, sans doute, dans l’avenir.

L’affaire du Mexique occupait M. Molé depuis un an, et il en était déjà question dans le dernier discours de la couronne. Nos grands intérêts commerciaux n’ont pas cessé d’occuper le président du conseil depuis qu’il dirige les affaires étrangères, et peut-être que les esprits impartiaux lui sauront gré de l’énergie apportée au dehors dans les actes d’un gouvernement qui se fait une loi de traiter les affaires intérieures avec un rare esprit de mesure et de conciliation.

Le ministère a donné une nouvelle preuve de cet esprit qui l’anime, et de