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L’USCOQUE.

SECONDE PARTIE.[1]

Il s’écoula encore assez de temps avant l’arrivée d’Orio. Elle fut annoncée par l’esclave turc qui ne quittait jamais Orio. Lorsque le jeune homme entra, Ezzelin fut frappé de la perfection de ses traits, à la fois délicats et sévères. Quoiqu’il eût été élevé en Turquie, il était facile de voir qu’il appartenait à une race plus fièrement trempée. Le type arabe se révélait dans la forme de ses longs yeux noirs, dans son profil droit et inflexible, dans la petitesse de sa taille, dans la beauté de ses mains effilées, dans la couleur bronzée de sa peau lisse, sans aucune nuance. Le son de sa voix le fit reconnaître aussi d’Ezzelin pour un Arabe qui parlait le turc avec facilité, mais non sans cet accent guttural dont l’harmonie, étrange d’abord, s’insinue peu à peu dans l’ame, et finit par la remplir d’une suavité inconnue. Lorsque le lévrier le vit, il s’élança sur lui comme s’il eût voulu le dévorer. Alors le jeune homme, souriant avec une expression de malignité féroce, et montrant deux rangées de dents blanches, minces et serrées, changea tellement de visage, qu’il ressembla à une panthère. En même temps il tira de sa ceinture un poignard recourbé, dont la lame élincelante alluma encore plus la fureur de

  1. Voyez la livraison de la Revue du 15 mai.