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ORIGINES DU THÉÂTRE.

Les festins donnés par les ministres du culte, et surtout par ceux de Bacchus, étalaient, comme les repas des particuliers, ce cortége de danseuses et de musiciennes. On lit dans Aristophane :

« Cours vite au festin muni d’une corbeille et d’une coupe. Le prêtre de Bacchus t’invite. Hâte-toi ; on n’attend plus que toi pour commencer. Tout est prêt : lits, tables, coussins, couvertures, couronnes, parfums, desserts ; les courtisanes sont arrivées ; galettes, gâteaux, pains de sésame, massepains, belles danseuses, tu y trouveras toutes les délices d’Harmodios[1]. »

Enfin, quand le luxe de l’Asie eut tout-à-fait envahi la Grèce, on vit de riches voluptueux appeler à leurs festins des danseuses nues[2], des chanteuses nues, des harpistes nues[3]. On entendit des épithalames entonnés par des chœurs de cent voix. On eut de jeunes esclaves habillées en Nymphes et en Néréides. Enfin on poussa le goût des effets dramatiques jusqu’à introduire dans les banquets des décorations et des machines presque scéniques. Voici par quel coup de théâtre se termina le repas des noces de Caranus, riche Macédonien : « Le repas allait finir et le jour commençait à baisser, lorsqu’on ouvrit une partie de la salle que fermaient des rideaux blancs. Dès qu’ils furent relevés, des lampes, que fit monter un mécanisme caché, jetèrent un éclat subit. Alors on vit des Amours, des Dianes, des Pans, des Mercures, et beaucoup d’autres figures de ce genre, qui portaient des candélabres d’argent[4]. Nous admirions la perfection de cet ouvrage, quand on servit des sangliers vraiment érymanthéens, couchés dans des plats carrés, à bordure d’or. On fit faire le tour des tables à ces pièces énormes, que perçait un javelot d’argent[5]. »

BALADINS. — FOUS DOMESTIQUES. — NAINS.

À ces délices les riches habitans de la Grèce joignaient quelquefois des passe-temps plus grossiers. Outre les danseurs et les musiciens, qu’on appelait d’un nom commun acroamates, on faisait venir, pour amuser les convives, des bouffons, des faiseurs de tours, des joueuses de cerceaux, des gens qui dansaient sur les mains, des singes savans. Quelques gens riches se plaisaient à entretenir dans leurs maisons des fous, à l’exemple des Perses[6]. Les Sybarites mêmes avaient la passion ridicule des nains, avant que les lieutenans d’Alexandre l’eussent prise à Suse et à Ecbatane.

  1. Le Scholiaste explique, τὰ φιλταθ’ Ἁρμοδίου, par la chanson d’Harmodius. Nous avons déjà parlé de ce chant.
  2. On peut voir, dans les peintures égyptiennes, des danseuses vêtues d’une simple tunique transparente, et d’autres danseuses tout-à-fait nues. Voyez Rosellini, Monum. civ., pl. CXVIII, fig. 3.
  3. Athen., lib. IV, pag. 129, A. — Bœttiger prétend (De quatuor rei scen. ætatibus, pag. 17) que toutes les fois qu’il est question chez les anciens de femmes nues, il faut entendre qu’elles se sont dépouillées seulement de leur robe de dessus. Cette opinion ne me semble nullement prouvée, et sans vouloir affirmer que la nudité fût toujours complète, je crois qu’elle était, dans beaucoup de cas, plus étendue que ne le pensait M. Bœttiger.
  4. Le Musée du Louvre et la Bibliothèque royale possèdent de très beaux candélabres antiques. La tige de plusieurs représente une branche d’arbre qui rappelle les torches primitives.
  5. Athen., lib. IV, pag. 130, A.
  6. Le roi de Perse, dès le temps de Démarate, avait un fou à sa table. Voyez Plutarch., Lacon. apophth., pag. 220, C.