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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.
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14 mai 1838.


L’histoire secrète de la discussion de la loi des chemins de fer, serait un excellent morceau d’histoire, et tout-à-fait digne de la plume de quelques historiens d’une haute portée, qui n’en ignorent pas, sans doute, les moindres détails. Nous ne la ferons pas, tout instructive qu’elle serait pour l’intelligence de ce qui se passe de mystérieux en ce moment.

Comme dans la plupart des affaires de tous les temps, les dupes n’ont pas été en minorité dans celle-ci ; et si de grandes preuves d’habileté ont été données par quelques hommes, ce n’est pas précisément de celle qui ferait fortune dans la chambre, si elle éclatait au grand jour. Mais nous voulons, nous devons nous en tenir aux faits qui ont été publiés, et aux discours qui ont été prononcés à la tribune.

Un seul homme, dans la chambre, nous n’hésitons pas à le dire, a vu la question de haut. Il est vrai qu’il était merveilleusement placé pour cela. C’est M. Berryer. Quant aux autres sommités de la chambre, elles étaient enlacées par trop de petits intérêts, moteurs d’autant de petites passions. L’avantage qu’avait sur elles M. Berryer, c’est que le jour de son ministère n’est pas proche, et qu’il le sait. Il faut que tant de grands évènemens arrivent pour que M. Berryer trouve la juste récompense de son dévouement et de sa foi, que les petits évènemens, tels que la chute d’un cabinet, ne lui importent guère. Quand ce petit évènement se trouve devoir résulter des grandes combinaisons qui le préoccupent, tant mieux, sans doute, et c’était ici le cas. Aussi jamais M. Berryer n’avait été plus abondant, plus vif dans son allure ; et c’était un curieux spectacle que cette liberté, cette aisance dont jouissait M. Berryer, dans une chambre si éminemment composée dans l’esprit de la révolution de juillet, tandis que les illustrations parlementaires nées de cette époque étaient garrottées, par leur fausse position, sur leur banc. M. Berryer et M. Arago, voilà les deux orateurs que la coalition de M. Thiers, de M.  Gui-