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des vêtemens, usage qui passa dans les mœurs romaines, qui se conserva sous le Bas-Empire et pendant la durée du moyen-âge, et qui subsiste encore aujourd’hui dans tout l’Orient.

RÉCITATION DE TRAGÉDIES ET DE COMÉDIES.

Souvent quand on avait enlevé les secondes tables, on chantait des scènes entières d’Eschyle et d’Euripide. Ce talent que possédaient tous les Athéniens bien élevés fut une ressource utile pour quelques-uns d’entre eux faits prisonniers dans la malheureuse expédition de Sicile. « Plusieurs, dit Plutarque, de retour à Athènes, allèrent remercier Euripide, et lui dirent, les uns, qu’ils avaient recouvré la liberté pour avoir enseigné à leurs maîtres les morceaux de ses tragédies qu’ils savaient de mémoire ; les autres, qu’errans et sans ressources après la défaite, ils avaient trouvé le moyen de pourvoir à leur subsistance en chantant dans les campagnes des fragmens de ses pièces. »

Malgré la singulière opinion d’Euripide qui conseille dans sa Médée de bannir le chant et l’aulétique des festins et de les conserver pour le deuil et la tristesse ; et malgré le blâme mieux motivé de Platon, qui préférait les sages conversations au bruit des chanteuses et des joueuses de lyre, le goût de ces plaisirs dispendieux alla toujours en croissant :

« Pendant qu’on nous voit, dit Ménandre, conduire à l’autel une chétive brebis de la valeur de dix drachmes, quelle somme ne dépensons-nous pas, chaque jour, en joueuses de flûte, en danseuses, en parfums, en vins de Mendé et de Thasos !… Ne méritons-nous pas, quand nous sacrifions si mesquinement, que les dieux ne nous accordent en retour des biens que pour dix drachmes[1] ? »
DANSES PENDANT LES REPAS.

Les danses auxquelles se livraient dans les festins les esclaves et les courtisanes, offraient les tableaux les plus voluptueux et les postures les plus lascives. C’était l’Apocinus, le Baucismus, l’Igdis ; c’était l’Éclactisma, dans laquelle le pied de la danseuse devait atteindre jusqu’à son épaule[2] ; c’était, enfin, la Bibasis, danse dorienne, dans laquelle la danseuse devait frapper de son talon, et découvrir les attraits admirés dans la Vénus Callipyge[3]. On peut voir, sur les vases grecs et dans les peintures d’Herculanum, un grand nombre de figures qui représentent les danseuses admises dans les fêtes aristocratiques. Un voile transparent d’une couleur incertaine, entre le bleu et le blanc, relevé d’un côté, et flottant de l’autre, ou soutenu par la main droite, cachait à peine quelques-uns de leurs charmes. Quelquefois elles adoptaient le costume ou plutôt la demi-nudité des Bacchantes ; elles se montraient alors, comme dans quelques monumens antiques, à peine couvertes d’une peau de tigre, dansaient en agitant des crotales, ou en élevant au-dessus de leur tête un tambour garni de grelots.

  1. Menandr., Fram., pag. 107, seq., ed. Meinek.
  2. Schol. in Aristoph. Vesp. v. 1485.
  3. Poll. liv. IV, § 102