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DU RÉSEAU DES CHEMINS DE FER.

dire entre Bayonne et Bordeaux, le chemin de fer serait fort dispendieux ; le sol des Landes est naturellement nivelé, les bois abondent. Les Landes offrent une ressemblance frappante avec la région sablonneuse, couverte de pins et inhabitée, qui forme le littoral de l’Atlantique, dans l’Amérique septentrionale, de la Chesapeake à la Floride. Il semble évident qu’un chemin de fer pourrait y être établi aux prix américains, c’est-à-dire à raison de 200,000 ou 250,000 fr. par lieue.

Quant à l’embranchement par Nantes, la Loire suffisamment perfectionnée en autoriserait l’ajournement.

La ligne de Paris vers l’Allemagne centrale par Strasbourg pourrait pareillement être remplacée en partie par la navigation à vapeur. La Marne coule dans une direction qui serait à peu près celle du chemin de fer. Douze millions ont été votés, l’an dernier, pour le perfectionnement de cette rivière, il serait possible d’effectuer les travaux de telle sorte qu’un bateau à vapeur à grande vitesse pût remonter jusqu’à Châlons, ou jusqu’à Vitry, ou même jusqu’à Saint-Dizier[1]. Cette ligne pourrait aussi se confondre, pendant une cinquantaine de lieues, à partir de Paris avec celle de la Méditerranée, en adoptant pour l’une et pour l’autre une direction moyenne qui alongerait d’une heure seulement le voyage de Marseille et qui ajouterait moins encore au voyage de Strasbourg. Enfin il serait possible de remplacer temporairement, en totalité ou en majeure partie, ce tronc commun au chemin de fer de la Méditerranée et à celui de l’Allemagne, par la Marne ou par la Seine, rendues navigables en amont de Paris pour des bateaux à vapeur à grande vitesse.

L’exécution complète d’un chemin de fer de Paris au Havre serait

  1. L’administration voulait établir les écluses nécessaires à la canalisation de la Marne sur de belles dimensions, afin que les grands bateaux de la Basse-Seine pussent parcourir la Marne canalisée. Elle proposait, dans le projet de loi de 1837, de leur donner 7 mètres 80 centimètres de largeur. La commission de la chambre des députés n’approuva pas ce plan, et, conformément à sa proposition, l’allocation demandée par le ministre des travaux publics fut réduite à ce qu’il fallait pour construire des écluses larges seulement de 5 mètres 20 centimètres. On serait encore à temps de revenir à l’idée des ponts-et-chaussées, puisque les travaux ne sont pas en cours d’exécution.

    D’après le plan adopté, la Marne sera remplacée, sur un développement assez étendu, par un canal latéral. Si l’on voulait faire de cette rivière une ligne praticable pour de beaux bateaux à vapeur, il faudrait creuser le canal sur une plus grande largeur. La construction d’un canal de 23 mètres de largeur n’a rien dont on doive s’effrayer. Nous avons déjà dit que la province du Haut-Canada, qui n’a pas une seule grande ville, où les capitaux sont fort rares, et dont la population totale est à peine égale à la population moyenne de nos quatre-vingt-six départemens (400,000 âmes), avait entrepris et avancé l’exécution d’un canal dont la largeur va à 42 mètres 50 cent.