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REVUE. — CHRONIQUE.

gociations ; elles tendent toutes à demander l’établissement d’une administration plus régulière, la diminution de l’armée, l’éloignement des corps bavarois, en un mot l’emploi des fonds accordés par les puissances, d’une manière utile aux véritables intérêts de la Grèce. Depuis bien des années, le rôle de la France, vis-à-vis de la Grèce, a été un rôle de générosité, mais d’une générosité éclairée, et M. Mauguin, ainsi que ses amis, peuvent se rassurer. Jamais le gouvernement grec n’a entendu, de la part de la France, un langage à la fois plus ferme et plus sage que celui qu’elle lui tient aujourd’hui. La Grèce a engagé ses domaines nationaux comme hypothèque de l’emprunt ; le gouvernement français a adressé à lord Palmerston un plan d’aliénation de ces domaines, au profit de l’emprunt. La Bavière réclame, du gouvernement grec 4 millions qu’elle prétend lui être dus ; la France exige l’ajournement du paiement de cette dette, et en fait la condition de ses émissions. Il se peut que l’influence de la Russie s’exerce en Grèce, c’est le sort de tous les états faibles de subir l’influence des grandes puissances ; mais on peut être assuré que l’influence du gouvernement français est loin d’y être nulle, comme on voudrait le faire croire ici. Au reste, voici les conditions auxquelles les trois grandes puissances verseront la troisième série de l’emprunt. 1o  Le gouvernement grec cédera le revenu des biens nationaux hypothéqués par l’emprunt, et le revenu de ces biens sera affecté au paiement des intérêts annuels ; 2o  le trésorier-général rendra tous les six mois un compte exact de ces revenus ; 3o  on déduira de cette série les intérêts et l’amortissement de l’année courante ; 4o  le gouvernement grec sera invité à rétablir l’équilibre entre les recettes et les dépenses ; 5o  le remboursement de 4,000,000 de francs que réclame le gouvernement bavarois sera ajourné jusqu’en 1840, si toutefois cette réclamation est admise. Enfin le gouvernement français demande que 4,000,000 de la troisième série soient employés à l’établissement d’une banque nationale. Assurément, si l’influence de la Russie et de la Bavière se sont fait sentir, ce n’a été ni à Paris, ni à Londres, où ont été dictées ces conditions.

Tandis que la France imposait au gouvernement grec la condition de repousser ou d’ajourner les prétentions financières de la Bavière, quelques journaux se plaisaient à répandre le bruit que le gouvernement français négociait humblement, quelques millions à la main, le mariage d’une des filles du roi des Français avec l’héritier de la couronne de Bavière. Ces bruits n’ont trouvé aucune créance dans le monde où l’on est un peu informé des affaires ; mais ce monde n’est pas grand, et il n’en a pas fallu davantage aux journaux de l’opposition pour accuser le ministère de ravaler la dignité de la France. Un de ces journaux ne trouvait-il pas étrange que le ministère n’eût pas pris à partie la Gazette de Leipsig, qui dément en termes hautains la nouvelle de ce mariage ? La feuille allemande disait, il est vrai, que nul peuple n’est plus détesté en Grèce que les Français, et qu’un mariage entre une princesse française et un prince bavarois n’ajouterait rien, en Grèce, à l’influence de notre gouvernement. La lettre insérée dans la Gazette de Leipsig