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total de 17,500 élèves ; ce qui fait à peu près, sur 2,500,000 ames de population, 1/140 d’étudiant. Il n’y a pas, en Égypte, d’écoles de femmes. Les écoles des mosquées ne sont pas comprises dans le budget ; elles sont entretenues par des fondations pieuses, ou par la rétribution des élèves.

OBSERVATIONS SUR LES RECETTES

Quand aux recettes, on peut en faire trois catégories principales : 1o les impôts proprement dits, 2o les douanes et les apaltes, 3o les bénéfices de l’exploitation agricole et manufacturière.

On se figure généralement que les bénéfices sur les produits agricoles et manufacturés sont le revenu le plus important de l’Égypte ; vous voyez pourtant que l’impôt foncier et personnel est encore en possession des plus gros chiffres. Néanmoins, si l’on supprimait les monopoles, dont les bénéfices donnent un chiffre total de 84,860,000 piastres, les recettes ne balanceraient plus les dépenses. Il résulte de là que, tant que le pied de guerre actuel devra être maintenu, l’existence du pacha sera liée à celle des monopoles.

Il n’y a guère aujourd’hui que 3 millions de feddans en culture et payant le miri. Ce nombre s’élevait, sous les kalifes à 8 millions. Le barrage du Nil permettra de tripler le chiffre actuel, et par conséquent celui du miri, pourvu toutefois que l’on trouve des bras pour la culture.

Le chiffre du droit sur la translation des propriétés par succession vous paraîtra bien exigu ; c’est que ce droit ne se prélève que sur les propriétés urbaines et les jardins, toutes les autres propriétés appartenant à l’état[1].

Le revenu des douanes est peu considérable ; c’est qu’il n’y a de droits qu’à l’importation. Si le pacha établissait des droits à l’exportation, il devrait se résoudre à vendre meilleur marché ses produits, ou à supprimer les monopoles. Au surplus, cette exiguité du revenu des douanes est plus que compensée par les bénéfices sur les produits indigènes[2].

  1. L’état n’est pas propriétaire selon l’acception que l’on donne en Europe à ce mot ; il règle seulement la nature des plantations et des cultures, et achète les récoltes des grands produits. Il est vrai qu’il donne l’investiture de la terre, quand elle se trouve sans cultivateurs-usufruitiers ; mais c’est un droit qu’ont tous les gouvernemens possibles ; car d’une manière ou d’une autre, il faut toujours que la possession se transmette. Au reste, le gouvernement égyptien n’est point assez injuste pour dépouiller le cultivateur du capital qu’il aurait créé sur sa terre. Ainsi, à l’exception des grandes concessions faites à quelques Européens, à quelques Arméniens et à quelques Grecs (concessions dont la condition première est la restitution de la terre au bout d’un certain laps de temps, dans l’état où elle se trouvera), si le cultivateur égyptien veut vendre sa terre avec le capital immobilier qu’il y a créé, il le peut, et le gouvernement ne met aucun obstacle, n’impose aucun droit, à ces sortes de transactions, pourvu que les terres soient cultivées comme il l’entend, et qu’on lui cède les récoltes au prix fixé par lui. L’état ne donne la possession des terres que lorsqu’elles sont sans cultivateurs, ou que les cultivateurs ne savent pas ou ne veulent pas les cultiver ; mais, comme il y a encore en Égypte six millions de feddans cultivables, vous voyez que l’état a de la marge pour faire des concessions et donner des investitures.
  2. On avait proposé au pacha d’établir de forts droits à l’exportation, et de laisser libres