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devenait merveille. Au sortir d’une charade ou de quelque longue et minutieuse bagatelle, il entrait dans les sphères. Virgile, en une sublime églogue, a peint le demi-dieu barbouillé de lie, que les bergers enchaînent : il ne fallait pas l’enchaîner, lui, le distrait et le simple, pour qu’il commençât :


Namque canebat uti magnum per inane coacta
Semina, terrarumque, animæque, marisque fuissent,
Et liquidi simul ignis : ut his exordia primis
Omnia, etc., etc.

............
Il enchaînait de tout les semences fécondes,
Les principes du feu, les eaux, la terre et l’air,
Les fleuves descendus du sein de Jupiter…


Et celui qui, tout-à-l’heure, était comme le plus petit, parlait incontinent comme les antiques aveugles, — comme ils auraient parlé, venus depuis Newton. C’est ainsi qu’il est resté et qu’il vit dans notre mémoire, dans notre cœur.


Sainte-Beuve.




II.

PHYSIQUE.

Ce qui, chez les anciens, constituait la science de la physique, était surtout une recherche des conditions essentielles de la matière, une sorte de métaphysique sur les phénomènes naturels, laquelle s’efforçait de trouver dans une loi générale l’explication des faits particuliers. Ce que les modernes entendent par physique est au contraire une science qui commence par l’investigation des faits particuliers, et qui se propose, comme but suprême, de tirer de leur comparaison des lois de plus en plus générales, des formules de plus en plus compréhensives. C’est une longue expérience, c’est l’impuissance des méthodes divinatoires, c’est l’insuccès des esprits les plus hardis et les plus vigoureux qui a ramené les écoles modernes des spéculations hasardées aux observations patientes et minutieuses, et des théories destinées à expliquer les faits aux faits destinés à fonder les théories. Retrouver, dans les observations isolées qui se multiplient, le lien qui les unit ; mettre en relief,