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rectifie les articles 341, 345, 346, 347 et 362 du Code d’instruction criminelle et l’article 17 du Code pénal, dispose que, tant qu’il n’aura pas été établi un lieu de déportation, le condamné subira à perpétuité la peine de la détention, soit dans une prison du royaume, soit dans une prison située hors du territoire continental, dans l’une des possessions françaises qui sera déterminée par la loi. Ces dispositions n’indiquent-elles pas que, dès 1835, on songeait à préparer et à établir un lieu de déportation convenable : aujourd’hui, en 1837, on demande de l’argent aux chambres, non pour réaliser ce projet raisonnable, annoncé depuis long-temps, mais pour construire une prison nouvelle dans une île de la mer des Indes.

Le ministère est meilleur courtisan que philantrope. Il sollicite une dot pour la reine des Belges et un apanage pour le duc de Nemours. C’est aux chambres à concilier de hautes convenances avec les intérêts des contribuables et les principes de la matière ; elles auront à examiner si les conditions légales d’un apanage qu’elles sont appelées à voter, existent ; elles pourront rechercher si la France, à laquelle on demande un nouveau sacrifice pour la Belgique, retire de ces sacrifices et de son alliance de famille tous les avantages et les retours auxquels elle a tant de droits. C’est une occasion favorable de porter à la tribune la question de la contrefaçon belge, et de plaider la cause des intérêts français. Il faut espérer que le président du conseil ne la laissera pas échapper.

Les préparatifs pour la nouvelle expédition de Constantine se poursuivent toujours ; on dit néanmoins que rien ne sera définitivement arrêté qu’après la discussion que doit amener à la chambre des députés la demande d’un crédit supplémentaire. On parle des généraux Bugeaud et Danremont pour agir sous le commandement en chef de M. le duc d’Orléans. La position du maréchal Clausel qu’on attend d’un instant à l’autre est fort problématique : il semble que le gouverneur d’Afrique change d’amis et de soutiens. L’opposition paraît devoir le défendre avec moins de chaleur, tandis que le ministère et la cour lui prêteront plus d’appui qu’on ne pensait d’abord. La discussion sera vive. M. Baude a pris l’engagement solennel de s’expliquer sur la conduite du maréchal qu’il semble vouloir attaquer sans ménagement. La question d’Afrique nous amènerait-elle un épisode dans le genre du fameux procès d’Hastings ?

On s’attend toujours à une modification ministérielle. Toutes les convenances politiques s’opposent à ce que M. de Gasparin garde son portefeuille, et d’un autre côté le cabinet répugne à s’entamer lui-même. Cette répugnance remonte même plus haut, et l’on n’oublie pas à la cour ce mot souvent répété par le président inviolable de toutes les administrations : Les ministères sont des chapelets, quand un grain part, tout le reste file. »