détenus de l’un et de l’autre sexe : ils étaient séparés de la manière la plus sévère dans les cours, au réfectoire même ; ils avaient des écoles distinctes. Malgré tout cela, l’expérience a démontré la nécessité de les séparer plus fortement encore et d’avoir une maison centrale de correction pour les garçons et une autre pour les filles. Celle des filles est à Amsterdam ; celle des garçons à Rotterdam. J’ai fait de celle-ci l’inspection la plus détaillée. On ne s’y propose pas seulement de tenir les jeunes gens soumis et inoffensifs pendant le temps de leur détention : on s’y propose de les améliorer. L’incarcération et la rudesse du régime est le juste châtiment du délit ; car, d’abord et avant tout, il faut qu’il y ait châtiment. Mais le châtiment ne serait point approprié à sa fin s’il n’était un moyen d’amélioration, et la maison s’efforce de mériter son titre de maison de correction. On agit sur les jeunes détenus par l’ensemble du régime de la prison : 1o par la discipline destinée à leur rendre le sentiment de l’ordre et de l’autorité ; 2o par le travail auquel ils sont assujétis, et il y a à cet effet plusieurs ateliers. La tenue de la maison est militaire : tous les employés ont un uniforme et une attitude grave et décente qui est déjà un excellent enseignement. La nourriture est saine, mais presque grossière, et cela est juste. Chaque détenu n’a pas une cellule, mais chaque dortoir ne contient qu’un assez petit nombre de lits, et chacun de ces lits est un hamac. Tout cela m’a paru très propre et très convenablement disposé. J’aurais souhaité, pour mieux voir, les yeux de notre honorable confrère, M. Bérenger, et ses lumières pour interroger mes conducteurs. Du moins suis-je un juge compétent de l’école qui est annexée à cette maison. C’est ici qu’est le principal ressort de la correction. Cette école est composée d’une soixantaine de jeunes détenus, tous habillés uniformément d’un pantalon et d’une veste de toile propre, mais grossière. J’ai été frappé des progrès qu’attestaient les cahiers d’écriture, souvent après très peu de temps d’école. J’ai surtout été satisfait des chants que j’ai entendus. Mais il ne faut pas oublier que ce n’est pas l’esprit qui manquait à ces jeunes gens. Le maître est lui-même un jeune homme plein de gravité et de douceur, qui est comme le père de ses élèves. On lui avait proposé de lui adjoindre un des gardiens de la maison pour maintenir l’ordre ; il n’en a pas voulu, par cette raison qu’il aurait l’air d’avoir peur,
Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 9.djvu/186
Cette page a été validée par deux contributeurs.
182
REVUE DES DEUX MONDES.