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STATISTIQUE PARLEMENTAIRE.

M. Mauguin, après lui avoir lancé quelques-unes de ses flèches les plus acérées, achevait sa péroraison avec un phlegme désespérant.

Quelques personnes prétendent que M. Mauguin aura un jour un parti. C’est possible ; mais jusqu’à présent, il ne nous paraît pas avoir eu grande envie de sortir de son isolement.

La gauche modérée compte 62 représentans. C’est un parti ferme et énergique, consciencieux et intelligent. Nous le croyons trop avancé encore dans l’opposition, trop peu pratique ; mais il faut rendre hommage à ses talens, à son esprit de conviction.

Les principaux membres de cette section sont :

MM. Bacot, Bignon de l’Eure, Briqueville, Charamaule, Comte, Demarçay, Desjobert, Golbéry, Havin, Isambert, L’herbette, Luneau, Nicod, Sade, Tracy, etc., etc.

Leur chef est M. Odilon Barrot, l’un des cinq grands orateurs de la chambre. M. Odilon Barrot a sur plusieurs points des connaissances approfondies, et c’est un homme d’une grande noblesse de principes, d’une sévère probité. Il a toutes les vertus démocratiques, il en a les passions, mais tempérées par des mœurs douces et un caractère aimable. Comme orateur, il n’a ni la verve abondante de M. Thiers, ni les formes un peu recherchées de M. Berryer. Il est grave et solennel, et se plaît dans les démonstrations des grandes généralités et des principes libéraux. Dans la dernière session, M. Odilon Barrot, sans abdiquer aucun de ses principes, s’est tenu à l’écart et n’a pas pris la parole aussi souvent qu’il eût pu le faire. Si dans la session qui vient de s’ouvrir, il cède au vœu de ses amis, il jouera un grand rôle, car c’est un de ces hommes qui se fortifient sans cesse par l’étude. Il jouit d’une considération méritée, il a sur la chambre un ascendant réel, et il est soutenu par un parti capable de le bien seconder.

Nous arrivons maintenant à la section de la chambre la plus puissante, la plus nombreuse, à celle du centre gauche. Il y a là 119 députés. Les uns faisaient partie du centre gauche de la restauration. Ils ont suivi toute leur vie cette ligne d’opposition mesurée, de libéralisme progressif dans laquelle ils marchent encore aujourd’hui. Les autres sont des hommes désabusés de la doctrine, qui, après avoir agi de concert avec elle sous le poids des circonstances, pensent qu’il est temps de l’abandonner dans ses points de vue trop restreints, dans ses timides préoccupations, et de se rallier à des idées plus larges, mieux assorties à nos véritables intérêts. D’autres, enfin, sont des hommes nouveaux qui, arrivant à la chambre avec le sentiment de leur force et de leur devoir, ont craint de