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pas achevé. Nul ne connaît sa maison aussi bien que me sont connus le bois sacré de Mars et l’antre de Vulcain, voisin des îles Éoliennes. Les tempêtes soulevées par les vents, les supplices dont Éaque châtie les ombres, l’or de cette toison enlevée à une contrée lointaine ; les frênes, javelots énormes du centaure Monychus, voilà ce dont retentissent sans cesse les allées de platanes de Fronton, ce qui fait rompre les colonnes de marbre de ses portiques, à la voix d’infatigables lecteurs. Qu’on n’attende désormais rien autre chose de nos poètes, grands ou petits. »

Semper ego auditor tantum ? Nunquam ne reponam,
Vexatus toties rauci Theseïde Codri ?
Impune ergo mihi recita verit ille togatas,
Ille elegos ? Impune diem consumpserit ingens
Telephus ? Aut summi plena jam margine libri
Scriptus, et in tergo, necdum finitus Orestes ?
Nota magis nulli domus est sua, quam mihi Lucus
Martis, et Æoliis vicinum rupibus antrum
Vulcani. Quid agant venti, quas torqueat umbras
Æacus, unde alius furtivæ devehat aurum
Pelliculæ, quantas jaculetur Monychus ornos,
Frontonis platani, convulsaque marmora clamant,
Semper et assiduo ruptæ lectore columnæ.
Expectes eadem a summo minimoque poeta
[1].

Voilà ce que disait Juvénal et ce qu’il ne devait pas dire le dernier. Mais c’est trop nous écarter de l’époque poétique dans laquelle nous devons nous renfermer, et que j’ai cherché aujourd’hui à vous faire embrasser d’une seule vue, rassemblant, dans cette espèce de statistique préliminaire, tous les élémens d’originalité qui ont contribué à la produire. Deux de ses poètes particulièrement, les premiers de tous, Virgile et Horace, devront désormais nous occuper et suffiront de reste aux études de notre année par la variété de leurs œuvres et des questions qui s’y rattachent. Nous aurons à instruire de nouveau ce vieux procès des littératures primitives et des littératures d’imitation, du génie grec et du génie romain. Nous pouvons prévoir que nous ne le terminerons point, et que, les parties entendues, nous prononcerons dans notre impartialité comme ce juge que fait parler un de nos auteurs : et vitula tu dignus et hic[2]. Aussi bien est-ce le jugement des siècles auquel il est sage de s’en tenir, qu’il ne s’agit point de réviser, de casser, mais seulement de comprendre et d’expliquer. Je souhaiterais que ces explications ne vous parussent pas indignes d’être entendues, et je trouverais dans votre présence, dans une bienveillante attention, qui ne m’a point manqué jusqu’ici, l’encouragement et la récompense de mes efforts.


— La sixième livraison des Œuvres complètes de George Sand, qui se compose des deux volumes d’Indiana, vient de paraître. Ainsi, douze volumes, sur dix-huit que formera cette belle collection, sont maintenant publiés. Cette édition complète, imprimée avec le plus grand soin, sera terminée, en avril 1838, par la publication de Lélia, augmentée d’un volume inédit.

M. Edgar Quinet vient de mettre sous presse un poème en trois parties, qui a pour titre : Prométhée, et qui paraîtra à la fin de janvier prochain,


F. BULOZ.
  1. Sat., i, 1 sq.
  2. Virg., Eglog., iii, 109.