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de négociations entamées entre les grandes puissances pour mettre un terme à la guerre civile d’Espagne, par un arrangement qui aurait pour base principale le mariage de la jeune reine avec le fils aîné de don Carlos. Que ce projet ait existé et qu’il puisse reprendre faveur auprès de certains cabinets, c’est ce dont on ne saurait douter. Mais il est d’une exécution impossible ; et sans le concours de la France, qui se chargerait d’en imposer l’acceptation aux parties belligérantes ? Ce qui ressort le plus clairement de toute la politique du gouvernement français envers l’Espagne, c’est l’invariable détermination de ne pas mêler le drapeau français dans la querelle, tout en rendant néanmoins assez de services à la cause de la reine pour mettre hors de doute l’attachement qu’on lui porte ; mais on n’ira point au-delà. On ne veut pas avoir la lourde responsabilité de l’avenir de l’Espagne, en épousant telle ou telle combinaison d’hommes ou de choses, qu’il faudrait ensuite soutenir d’une manière efficace. Et, pour tout dire, on est parvenu, servi par des évènemens inespérés, à faire entièrement abandonner cette question par l’opinion publique, qui jamais n’a été convenablement dirigée sur ce grand intérêt, commun à la révolution et à la dynastie de juillet.

Le gouvernement portugais a enfin surmonté les obstacles qui s’opposaient depuis si long-temps à la formation d’un nouveau ministère, et deux des généraux qui ont vaincu l’insurrection chartiste sont entrés dans le cabinet. Ce sont MM. de Sa da Bandeira, en qualité de président du conseil, ministre des affaires étrangères, et le baron de Bomfim, en qualité de ministre de la marine, chargé par intérim du portefeuille de la guerre. On aurait désiré que le vicomte Das Antas acceptât ce département, qui n’est pas encore rempli ; mais il a voulu s’en tenir au titre d’inspecteur-général de l’armée, pour se livrer entièrement à la réorganisation des forces nationales, qui ont cruellement souffert des derniers troubles et de la pénurie du trésor. La composition de ce ministère est de nature à rétablir entre les cortès constituantes et la cour une harmonie qui n’existait plus, et que le malheureux état du Portugal rend plus nécessaire que jamais. Dans le premier mouvement d’irritation qui avait suivi la résistance de la reine aux propositions de son ministère contre les officiers et généraux révoltés, au moment même où succombait la cause chartiste, les cortès, dominées par l’influence des clubs et d’une partie de la garde nationale, avaient refusé au pouvoir royal toute intervention dans la constitution du sénat. Le sénat devait émaner directement des colléges électoraux, et la législature devait se composer de deux corps purement électifs. À la suite de ce vote, une scission s’était opérée dans le sein des cortès, et plusieurs membres avaient cessé de prendre part aux opérations de l’assemblée, qui, effectivement, était sortie par là de la voie dans laquelle elle avait marché jusqu’alors. Déjà le ministère de M. de Castro avait cessé d’exister ; sa démission était donnée, et il n’attendait pour se retirer que la nomination de ses successeurs. Mais la décision des cortès à l’égard du sénat devint un grand obstacle. Les personnages politiques appelés à former le noyau d’une nouvelle administration