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On ne compte dans ce pays que par dizaines de siècles. La mine appartient aux huit communes de la vallée ; elle leur a été régulièrement concédée par le gouvernement de juillet ; jusque-là elles n’en étaient qu’usagères. Sous Napoléon, il avait été question d’employer le fonds de réserve assez considérable de ces mines à doter un maréchal de l’empire ; la propriété des mines elles-mêmes fut aussi un instant menacée du même sort[1]. Grace à l’acte de concession accordé en 1833, l’idée même de ces spoliations est désormais impossible. La mine de Rancié a donné lieu à des travaux immenses fort intéressans à visiter. Le système d’exploitation qui fut suivi autrefois y rend sur plusieurs points l’extraction dangereuse, particulièrement vers le printemps, et l’on y admire le courage des montagnards, qui font le métier de mineurs, le sang-froid de leurs chefs ou jurats, et la science des ingénieurs chargés par l’administration de diriger la mine et de maintenir l’ordre et la sécurité dans les chantiers établis parmi les éboulis des anciens. Le minerai forme, au milieu de la montagne, un amas qui, du niveau de la galerie Becquey, près le village de Sem, au sommet du mont Rancié, a 538 mètres (1,650 pieds) de hauteur, sur une longueur à peu près indéfinie, et sur une largeur qui souvent dépasse cent pieds. À force de tirer du minerai du sein de la terre, sans plan régulier, sans laisser çà et là des piliers pour soutenir le poids des couches supérieures, les anciens, les vieux pères, comme disent les mineurs de Belgique, ont bouleversé le terrain, ont fait craquer la cime de Rancié, ont brisé et confondu la stra-

    midi ne paraît point devoir renverser les forges catalanes. Celles-ci donnent des fers de qualité supérieure ; d’ailleurs, elles sont aujourd’hui en train de s’améliorer sous le rapport économique, et sous celui de la fabrication en elle-même. Un couloir et une route que le département va construire près de la mine de Rancié, abaisseront le prix du minerai. Une autre route que le gouvernement a résolue, et qui n’attend plus que la sanction de la commission mixte, dont, il est vrai, la précipitation est le moindre défaut, amènera aux forges, à bon compte, un autre minerai, celui de Puymorens, qu’il serait avantageux de mêler à celui de Rancié. Les beaux travaux métallurgiques de M. l’ingénieur François permettent, dès à présent, 1o  de diminuer la consommation du combustible, qui est la plus grosse dépense de ces forges ; 2o  de retirer d’une même quantité de minerai une plus forte proportion de fer, et d’un fer meilleur ; 3o  de donner au fer, par quelques modifications dans le matériel, et par l’application bien entendue de quelques-uns des mécanismes anglais, une meilleure façon qui en augmenterait la valeur sur le marché. Déjà un grand établissement s’élève, où tous ces perfectionnemens seront mis en pratique ; il est situé sur l’Ariége, à Saint-Antoine, à une lieue environ au-dessus de Foix ; il est dirigé par un industriel éclairé et infatigable, M. Garrigou, dont le nom rappelle, dans le midi, de grands services rendus à l’industrie métallurgique. L’Ariége fournit à la forge de Saint-Antoine une force motrice de 1,200 chevaux.

  1. Ce projet rencontra une vive résistance de la part du préfet de l’Ariége et de M. d’Aubuisson, qui est encore aujourd’hui ingénieur en chef de l’arrondissement métallurgique dont le département de l’Ariége fait partie.