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risé par ses dents molaires, tout-à-fait simples, se nourrit surtout, dit-il, des queues si lourdes et si grasses que portent les moutons d’Afrique, et que l’on est quelquefois forcé de soutenir dans un petit charriot.


La pyrale et l’Académie. — Une commission nommée par l’Institut, sur la demande des propriétaires et cultivateurs de vignes, à Argenteuil, tout près de Paris, était allée constater le dommage causé par la pyrale, mais n’avait pu y apporter aucun remède efficace ; M. Duméril, qui l’avouait dans son rapport, se hasardait pourtant « à conseiller de frotter, avec un linge rude, le pied des ceps de vigne, pendant la gelée, et à les barbouiller aussitôt avec une eau chargée de chaux, » pour détruire les petites chenilles qui restent alors engourdies entre les fibres de l’écorce. Il rappelait les observations faites anciennement, sans plus de résultat, et citait un mémoire de Bosc qui se termine ainsi : « Les multiplications extraordinaires des insectes ne sont pas de longue durée, et cela doit donner aux habitans d’Argenteuil l’espoir d’être dédommagés l’année prochaine. »

M. Audouin qui, depuis quelque temps, en vue sans doute d’un fauteuil académique, a porté toutes ses idées sur l’application de l’histoire naturelle des insectes à l’agriculture, s’est fait envoyer par le ministre pour lutter contre le même fléau qui a dévasté, cette année, les vignobles du Mâconnais. Or, la pyrale est tout simplement un petit papillon qui, à l’état de chenille, a vécu aux dépens des jeunes pousses et des feuilles de la vigne. Ses dégâts ne se font voir que quand il s’est multiplié extraordinairement ; on conçoit parfaitement qu’alors les cultivateurs désirent et demandent un préservatif contre un mal qui, s’il allait toujours croissant, les aurait bientôt ruinés ; mais le certificat savamment rédigé que les cultivateurs du Mâconnais ont récemment adressé à l’Académie, à l’appui du rapport de M. Audouin en butte aux attaques d’un adversaire jaloux, prouve sans contredit que ces cultivateurs étaient au moins capables d’inventer les procédés que M. Audouin est allé leur indiquer. Car, en définitive, à part les lampions placés dans les vignes, à vingt-cinq pas de distance, sous des cloches huilées, et auxquels on paraît devoir renoncer, il ne s’agit plus que d’aller cueillir les œufs déposés sur les feuilles.

Cette fameuse pyrale a été le sujet de trois ou quatre lectures faites d’urgence à l’Institut. Tous les journaux en ont retenti ; mais on a dû rester convaincu que l’agriculture et l’Académie des sciences n’ont pas grand’chose à démêler ensemble. Réaumur, un des plus grands naturalistes du dernier siècle, n’a pu, quoiqu’il ait parfaitement constaté les dégâts causés par beaucoup d’insectes, n’a pu, disons-nous, rendre aucun véritable service à l’agriculture, qui doit attendre bien plus d’une pratique éclairée et d’une attention de tous les instans que de la théorie la plus savante.

Ce n’est pas la première fois que des dégâts immenses ont été produits par des causes semblables ; nous citerons seulement les ravages causés, en 1735, par une grosse chenille verte, ordinairement assez commune, mais