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leur tour, commandent aux passions sensitives. Il en est de même des caractères dont Fourier fait une sorte de clavier humain, susceptible d’autant de combinaisons que peut l’être l’harmonie musicale. La hiérarchie des âges se présente sous un autre aspect : l’âge mûr en est le centre ; les deux ailes, l’une ascendante, l’autre descendante, sont, d’un côté, les années intermédiaires de l’enfance à la virilité ; de l’autre, celles de la virilité à la décrépitude. Pour la hiérarchie des fonctions, il n’y a rien à expliquer, c’est l’élection qui les confère ; mais la hiérarchie des corps de travailleurs, qu’on a vue dans ses alvéoles le groupe, la série et la phalange, se développe, dans la sphère supérieure, et forme tour à tour, la ville, la province, la capitale, la métropole continentale, la métropole universelle, enfin les armées industrielles. La phalange est un type d’association, un type étroit, mais complet ; c’est le reflet de la vie humaine. Cependant une phalange isolée n’aurait pas toutes ses conditions d’avenir, si elle n’attirait pas dans son tourbillon d’autres phalanges, qui, avec leur mouvement propre, auraient aussi un mouvement autour d’elle et par rapport à elle. Entre phalanges, les combinaisons sont les mêmes, les liens sont les mêmes qu’entre les groupes et séries ; les phalanges sont sollicitées à une association par des sympathies, par des intérêts, par des motifs d’utilité commune, tels que des ponts, des canaux, des routes, à l’exécution desquels toutes et chacune ont concouru. Bientôt, en dehors des phalanges se créeront de grands entrepôts, de grands établissemens scientifiques, de grandes manufactures, des bourses, des foires, des théâtres, des monumens d’art. Puis viendra la petite ville, centre général des phalanges, plus habitée l’hiver que l’été ; puis encore la ville provinciale, ou capitale de province, assise de manière à commander un vaste rayon intérieur, ou un beau bassin maritime, ensuite la capitale d’un empire, enfin la métropole universelle, dont Fourier fixe l’emplacement sur le Bosphore. L’un des liens les plus puissans de cette grandiose hiérarchie seraient les armées industrielles, autorité nomade et pacifique, se portant sur tous les points où les appelleraient l’utilité et la gloire communes. Une armée industrielle devra se composer, selon Fourier, de tous ceux qui excellent dans les beaux-arts, dans les sciences, dans l’industrie ; elle sera donc une réunion spontanée et libre, où chacun s’entretiendra à ses frais. Le but sera souvent d’agrément, mais, dans plusieurs cas, l’armée industrielle devra concourir aux grands travaux du globe, aux améliorations dans la climature, aux lignes importantes de communication, à la construction des vastes