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mêmes et un mouvement autour des corps roulant dans leur tourbillon. Le même phénomène se reproduirait au sein de la phalange, composée d’une infinité de petits centres ayant leur jeu propre, et leur jeu relatif à d’autres centres identiques. On va voir tout à l’heure le système à l’œuvre.

Le moteur de cette association est, nous l’avons dit, l’attraction passionnée, ce principe à mille fins. L’attraction vers le travail, c’est à cela que l’humanité pourra reconnaître qu’elle entre dans ses destinées futures. Que voyons-nous aujourd’hui ? D’un côté le riche qui ne travaille pas, d’un autre côté le pauvre qui travaille avec dégoût, des deux parts répugnance. N’est-ce pas là, dit Fourier, un état anormal ? Quoi ! Dieu aurait imposé le travail à l’homme comme une nécessité impérieuse, et en même temps il lui aurait mis dans le cœur une horreur instinctive pour le travail ! Évidemment il y a confusion. La répugnance n’indique qu’une chose, c’est que Dieu ne veut pas que le monde use éternellement son énergie en des besognes ingrates. Le jour où une meilleure entente présidera à la distribution du travail, les riches oisifs disparaîtront ; ils jalouseront ce qui était l’attribut du peuple. Pour cela, il faut que le travail soit une affaire d’option, un choix, un goût, une préférence, une passion enfin. Chacun s’adonnera à l’occupation qu’il aime, à vingt s’il en aime vingt. Une rivalité charmante, un enthousiasme toujours nouveau, présideront aux travaux humains, quand, sous la loi de l’attraction, les mortels se seront associés par groupes, dernière fraction sociétaire, par séries, qui sont l’association des groupes, et par phalanges, qui sont l’association des séries.

Le groupe est la sphère primitive de toute fonction, l’alvéole de la ruche sociale, le noyau de l’association. Un groupe, pour être normal, doit se composer de sept ou de neuf personnes : au-dessous il serait insuffisant, au-dessus il courrait la chance de manquer d’harmonie. L’harmonie particulière d’un groupe résulte de l’amalgame des attractions tantôt divergentes, tantôt parallèles ; l’harmonie générale entre les divers groupes résulte de leur caractère, soit identique, soit opposé. Dans la composition des groupes, toute passion est considérée comme ressort : ainsi tantôt c’est l’amitié, tantôt c’est l’intérêt, tantôt c’est l’amour, tantôt c’est la gloire qui domine un groupe, et, dans son sein, l’essor de toute passion doit avoir lieu en identité et en contraste. Chaque groupe a des modes de ralliement distincts : dans les groupes d’amitié tous s’entraînent en confusion, c’est-à-dire se confondent, l’amitié supposant une égalité parfaite ; dans les