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Polytechnique, M. Considérant apportait à l’école cette raison calme et réfléchie, cette rectitude mathématique qui marchent toujours vers le côté rigoureux des choses. Homme d’ardente exécution, il chercha à tirer sur-le-champ la doctrine sociétaire des voies spéculatives où elle se serait allanguie et stérilisée. Charles Fourier, sûr de sa force, attendait que l’on vînt à lui, et dans les relations ordinaires il apportait la forme absolue, tranchante, impérieuse de ses théories. M. Victor Considérant chercha à faire naître quelques occasions de contact entre ce génie boudeur retiré dans sa tente et un monde qui l’avait froissé, faute de le connaître. On essaya divers moyens de propagation : des conférences furent ouvertes à Paris, dans lesquelles Fourier exposa quelques parties isolées de son système ; puis on songea à la province, et M. Considérant ouvrit à Metz le premier cours public sur la théorie.

C’était alors le moment où, après avoir jeté quelque éclat, le saint-simonisme se dispersait dans les voies du doute et du découragement. Quelques-uns de ces novateurs, et entre autres deux hommes distingués par leur savoir, MM.  Jules Lechevalier et Abel Transon, gagnés à la foi sociétaire, passèrent sous les drapeaux du maître, en proclamant sa supériorité. M. Jules Lechevalier ouvrit un cours à Paris et le publia ensuite par livraisons ; M. Abel Transon donna à la Revue Encyclopédique deux articles qui résumaient la loi sociétaire. D’autres ouvrages fortifiaient cette propagande. M. Victor Considérant produisait tour à tour la Destinée sociale, les Considérations sur l’architectonique, De l’un des trois discours à l’Hôtel-de-Ville, et la Débâcle de la politique en France ; M. Just Muiron, les Transactions de Virtomnius ; Mme Clarisse Vigoureux, les Paroles de providence ; M. Morize, les Dangers de la situation actuelle de la France. Peut-être aurait-on à reprocher à quelques-unes de ces publications un défaut commun, à côté de belles qualités ; ce serait celui de se préoccuper beaucoup trop de petits débats quotidiens qui devraient s’effacer toujours devant des questions de lointain avenir. Nous aimerions mieux aussi, dans la forme, plus d’onction et moins de rudesse, plus de ménagemens surtout envers les hommes d’intelligence, qui se dévouent au périlleux honneur d’intéresser, chaque matin, un public blasé et moins avancé qu’eux en toutes choses.

Grâce à ce concours de publicistes et de penseurs, la propagation prit quelque essor, et l’on dut songer à lui créer un organe. Un journal, le Phalanstère, fut fondé par les soins de Mme Vigoureux et de MM.  G… et Baudet-Dulary, alors député. MM.  Victor Considérant,