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d’autrefois sont politiquement les mêmes personnes ; il n’y a de différence entre eux que celle des mœurs, qui portent nécessairement l’empreinte du temps où l’on vit.

Nous avons, quant à nous, la certitude de ne rencontrer les républicains pas plus dans l’avenir que dans le présent. Voilà pourquoi il nous paraît que l’opposition ne fait pas assez en s’abstenant de coopérer, avec le parti républicain, à l’œuvre d’un comité électoral, et qu’elle devrait encore refuser son suffrage, dans les colléges, à tout candidat, légitimiste, républicain ou doctrinaire, qui n’acceptera pas, sans arrière-pensée, les institutions du pays. On ne peut pas voter pour la monarchie, et contribuer en même temps à la nomination d’un député qui voterait, au besoin, contre la monarchie. Si la séparation n’est pas complète, si elle ne s’opère pas d’une extrémité à l’autre de l’échelle représentative, elle n’a pas de sens ni de résultat.

Il est inutile de rechercher si M. Odilon Barrot a été exclu du comité central, ou si, comme on affecte de l’affirmer, l’honorable député s’est exclu lui-même. M. Barrot, en déclarant qu’il ne pouvait pas faire partie d’une réunion où siégeraient aussi les amis de M. Garnier-Pagès, ne se dissimulait plus que l’extrême gauche, après avoir long-temps hésité entre l’opposition constitutionnelle et l’opposition radicale, en était venue à préférer l’alliance de ce dernier parti ; et les fondateurs du comité, en y introduisant M. Garnier-Pagès, n’ignoraient pas qu’ils allaient prononcer l’exclusion de M. Odilon Barrot et de ses amis. Tout s’est fait, des deux parts, en parfaite connaissance de cause. L’extrême gauche a dû s’attendre à porter la responsabilité de l’alliance républicaine qu’elle a provoquée, appuyée, et scellée de son consentement ; quant à la responsabilité de la scission qui émancipe définitivement la minorité parlementaire, c’est un titre de gloire, c’est un précédent moral dans les mœurs représentatives, que M. Odilon Barrot n’aura pas la faiblesse de répudier.

Quelle que fût, dans la pensée de ses promoteurs, la portée de la coalition, les circonstances en ont fait un évènement important. Il n’est plus possible de réduire à l’insignifiance d’une transaction passagère, une combinaison qui a eu pour premier résultat de couper en deux l’opposition, et qui va modifier par contre-coup la situation de tous les partis. Rien de plus grave ne s’était passé, en France, depuis l’apparition du compte-rendu.

On a charitablement insinué (il est vrai que l’insinuation part d’un rival) que M. Barrot, séparé de l’extrême gauche, n’avait plus qu’à