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L’OPPOSITION ET LE PARTI RADICAL.

cette transformation lorsqu’il est entré dans le comité ? N’a-t-il pas stipulé, au contraire, très expressément, la réserve de ses espérances et de ses opinions dans leur intégrité ? Or, s’associer à une pareille opinion, même pour un jour, même pour un seul acte de la vie politique, c’est conspirer malgré soi, conspirer de cette conjuration morale qui ne tombe pas sous l’action des lois, mais qui engage la conscience et l’avenir d’un parti.

Quelle peut être en effet la base d’une alliance électorale qui débute par ne tenir aucun compte des institutions, et dont les membres se croient libres de comprendre la charte dans leur traité ou de l’excepter ? Vous vous accordez sur tout le reste ; mais le reste, qu’est-ce ? demandent justement les doctrinaires. Et le comité ne répond pas à cette foudroyante interpellation !

Nous sommes fort éloigné de prétendre que la charte de 1830 soit, comme on le disait, en 1828, de la charte de 1814, le dernier mot du système représentatif ; mais, telle que nous l’avons, elle résout, pour le moment, toutes les questions de forme que l’on puisse agiter dans le jeu régulier des pouvoirs. Et si le bon accord du comité portait sur quelqu’une de ces difficultés sans porter en même temps sur la charte, il faudrait en conclure que la coalition ne se contente pas de réserver la constitution, mais la proscrit.

À défaut d’un programme politique, est-il dans les desseins du comité de se faire le promoteur de quelque réforme qui touche au fonds même de la société ? Les coalisés adopteraient-ils, par exemple, la définition donnée par Robespierre et Saint-Just du droit de propriété ? Ont-ils quelque constitution nouvelle du travail à nous proposer ? Ont-ils inventé un expédient qui mette fin aux misères et aux douleurs du paupérisme ? Que feront-ils du crédit et que feront-ils pour l’industrie ? Si le but de l’alliance est plutôt social que politique, pourquoi ne pas conserver la forme d’une école philosophique, et d’où vient que l’on affecte la valeur ainsi que l’influence d’un parti ?

Ni ceci, ni cela ; la coalition est tout et n’est rien. Elle n’a point d’objet avoué ni de principes reconnus ; elle embrasse tous les changemens possibles ou impossibles, sans en avoir précisément un seul en vue. Mais du fond de ce chaos paraissent sourdre des tendances mystérieuses et encore mal arrêtées, qui finiront par se dessiner. La république y est en germe ; ce n’est pas la monarchie qui s’y développera.

On a beaucoup dit que, dans toute alliance d’opinions, le parti le plus avancé doit dominer et donner son nom. Cela n’est pas tou-