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ORGANISATION FINANCIÈRE DE LA GRANDE-BRETAGNE.

Les sociétés de banque par actions se sont au contraire prodigieusement multipliées, et les plus anciennes ont étendu sans mesure leurs opérations. De 1833 à 1836, elles ont travaillé à substituer, dans la circulation, leur papier à celui de la Banque d’Angleterre, qui fondait pendant ce temps de nombreuses succursales et frappait de nouveaux billets, pour étouffer la concurrence qui la menaçait. Il en est résulté, d’une part, que les émissions des banques par actions se sont accrues de plus de 50,000,000 de francs, et de l’autre, que la banque n’a pas réduit les siennes, pendant que le numéraire en réserve dans ses caisses diminuait de près de 100,000,000 de francs.

Nous signalons ces faits sans prétendre les convertir en chefs d’accusation. Une somme de 50,000,000, voilà quel est, en définitive, l’excédant des valeurs créées depuis 1833 ; et quel que soit l’établissement qui a donné au crédit ce surcroît d’impulsion, nous ne saurions croire qu’il en fût résulté un bouleversement commercial, sans le contre-coup qu’a produit en Angleterre la crise des États-Unis. Celle-ci a été la goutte d’eau qui fait déborder un vase déjà trop plein.

La clameur qui s’élève depuis quelque temps, en Angleterre, contre les sociétés de banque par actions, s’attache beaucoup moins au mal qu’elles ont fait qu’à celui qu’elles peuvent faire, et aux personnes qu’à l’institution. La loi n’exige des sociétaires que d’insignifiantes garanties. Il suffit d’acheter une licence, et de faire connaître le nombre des actionnaires, pour avoir le droit de créer une banque. Aujourd’hui l’on compte plus de cent banques par actions en Angleterre. Elles ne sont assujéties qu’à la simple formalité de déclarer, chaque trimestre, à l’administration du timbre, la moyenne de leurs billets (bank-notes)] en circulation. La loi ne prescrit rien quant à la proportion du capital réalisé avec les billets émis ; la faculté d’étendre ce capital n’est pas moins illimitée que celle d’augmenter les valeurs en circulation. Les actionnaires, quoique responsables dans leur fortune personnelle des engagemens de la compagnie, ont plus d’un moyen de décliner cette responsabilité ; les statuts ne sont soumis ni à l’approbation, ni à la révision de l’autorité compétente ; enfin la loi n’exige pas que le fonds de garantie soit tenu en réserve sous forme d’espèces métalliques, ou de valeurs non susceptibles de dépréciation (securities).

Il faut dire que le silence de la loi représente fidèlement ici, à certains égards, les lacunes actuelles de la science. La Banque d’Angleterre a bien admis pour règle qu’elle aurait dans ses caves, en numéraire ou en lingots, le tiers du montant réuni de ses émissions et des