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passions politiques. Elle comprend vaguement sans doute qu’il y a beaucoup à faire au dedans comme au dehors ; mais ses idées étant encore peu arrêtées à cet égard, elle semble, contre son habitude, attendre l’impulsion du pouvoir plutôt qu’elle n’est jalouse de la lui imprimer.

Une disposition analogue, on peut le croire, dominera dans la chambre prochaine. Le ministère sera-t-il en mesure de répondre à ce vœu d’initiative, d’exercer, en la réglant, l’activité d’esprit de la chambre ; et des questions de travaux publics, de finances et d’administration, suffiront-elles pour cimenter une majorité nouvelle ? Problème que les faits seuls pourront résoudre.

Ce qui est constaté pour tout observateur attentif, ce sont les incurables blessures que les vieux partis portent au cœur ; c’est la foi qui s’en retire et l’espérance qui leur échappe. Réfugiés dans l’histoire, qu’ils torturent, faute d’entretenir aucune espérance présente, les uns cherchent le suffrage universel dans les édits royaux du XVe siècle, les autres grandissent des scélérats vulgaires en les offrant comme la personnification d’idées puissantes et sociales. Ce qu’ils déplorent comme une torpeur passagère, c’est l’harmonie qui tend à s’établir entre les idées et les réalités pratiques, harmonie qui constitue le bien-être des nations, comme l’équilibre entre les désirs et les facultés constitue le bien-être des individus.

Ce serait chose difficile que d’organiser aujourd’hui contre le pouvoir des résistances puissantes, lors même que la paix extérieure viendrait à être compromise. Soyons justes envers nous-mêmes, et ne contribuons pas à entretenir l’Europe dans une illusion qu’il est aussi important de lui faire perdre dans son intérêt que dans le nôtre. Il n’y a désormais de Vendée possible pour aucun drapeau ; il n’est pas de parti qui, dans les circonstances les plus favorables, puisse aller au-delà de quelques émeutes partielles ; et s’il n’envisageait que les chances de sa consolidation, le pouvoir aurait peut-être plus à souhaiter qu’à craindre ce qu’en 1830 il pouvait redouter à bon droit comme le signal de sa chute. Le gouvernement des classes moyennes peut désormais se prévaloir de la force inhérente à toute idée qui a conscience d’elle-même et voit clair devant elle.

Est-ce donc à dire qu’en cas de complication au dehors, les partis du dedans se réuniraient dans un patriotique concert ? Non, assurément. Il y aura constamment des partis, et des partis malveillans et hostiles. Mais n’en a-t-il pas presque toujours existé depuis la fondation de la monarchie ? Serait-il donc si paradoxal de soutenir qu’à l’époque