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tive ? L’armée était trop peu nombreuse pour appuyer par la force les mesures décrétées par le congrès : elle donnait déjà, d’ailleurs, des signes non équivoques du changement de ses dispositions. Les cortès durent donc se borner à savourer, du haut de leurs chaises curules, les éloges des journaux étrangers sur leur sagesse législative : elles se remirent, faute de mieux, à travailler à la constitution, qui ne fut terminée que la veille du jour où elle fut abolie.

En retraçant l’histoire de cette constitution, on semble écrire celle de la charte de don Pedro, dont la destinée fut de se briser, en 1828, contre certaines résistances, pour en rencontrer, en 1836, d’un ordre tout différent. En Portugal, où les théories politiques sont encore choses d’assez peu de valeur, il n’importe guère à la noblesse, au clergé, à la magistrature, qu’une constitution proclame la souveraineté du roi ou celle du peuple ; mais il leur importe fort qu’on respecte leur existence politique, et surtout qu’on ne leur enlève pas leurs ressources financières. Or nous verrons bientôt que, sous ce rapport, la charte brésilienne ne différait guère de la constitution imposée à Jean VI en 1821.

Cependant les répugnances du peuple et de l’armée allaient croissant. Ces dispositions étaient entretenues par l’activité de la reine, qui, après avoir refusé le serment à la constitution, conspirait ouvertement contre elle. Déjà le comte d’Amarante avait fait une tentative, dans le nord, à la tête de quelques régimens de milice. Les milices, en effet, par l’organisation au principe de laquelle on vient de remonter, devaient être les premières à se détacher d’une révolution qui menaçait tous les intérêts anciens, sans être assez forte pour en créer de nouveaux. Tout annonçait, en Portugal, une crise prochaine, avant même que nos troupes eussent renversé dans Cadix le boulevart de la constitution espagnole.

Un jour, l’infant don Miguel, dirigé par sa mère, se retire à Villa-Franca, au milieu des mêmes régimens qui, moins de trois années auparavant, avaient poussé, à Porto, le premier cri d’indépendance. En deux heures, le mouvement militaire est décidé, et dans aucune classe de la nation, la constitution ne trouve un bras pour la défendre.

Le roi manquait seul au milieu des troupes dont les clameurs inauguraient son absolu pouvoir ; des tentatives réitérées furent vainement faites auprès de lui avant de le déterminer à les rejoindre. Ses angoisses, dans cette occasion, furent publiques. Le faible Jean VI tremblait-il pour sa sûreté ? redoutait-il l’agonie du parti révolutionnaire ? Mais, au premier bruit du mouvement, les cortès