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REVUE. — CHRONIQUE.

Les évènemens du Portugal présentent les mêmes complications. On a voulu également y reconnaître une influence étrangère. Là comme à Madrid un chef de corps est soupçonné d’agir secrètement avec le pouvoir royal pour changer la forme de la constitution. L’intervention anglaise terminerait-elle cette lutte ? Assurément, si la diplomatie française déploie à Lisbonne quelque activité, c’est sans doute pour empêcher ce principe de s’y exercer ; car la France sera aussi forte, et se montrera aussi influente au dehors en arrêtant les interventions étrangères, de quelque nature qu’elles soient, qu’en intervenant elle-même d’une façon active. Empêcher par sa médiation amicale l’intervention de l’Angleterre en Portugal, arrêter par ses négociations tout projet d’intervention en Sicile et à Naples, ce serait là remplir toutes les conditions du système de modération que la France s’est imposé jusqu’à ce jour. C’est là sans doute aussi ce qu’elle fait en ce moment.

À en croire quelques journaux légitimistes, l’Europe, pour nous servir d’une expression romantique, l’Europe craquerait encore d’un autre côté. On affecte de grandes inquiétudes pour la santé du roi de Suède, afin de rappeler les prétendus droits d’un jeune prétendant à la couronne de Wasa. Le prince Wasa, comme on l’appelle, et qui est tout simplement un prince de la maison de Holstein-Eutin, se trouverait appelé au trône, non pas seulement par la protection de l’Autriche et de la Russie, mais par les vœux des états et du peuple. Si ces pensées ont été conçues de bonne foi, nous pouvons rassurer ceux qui les ont adoptées. Ce n’est pas à l’avénement d’un jeune prince, aujourd’hui tout-à-fait inconnu en Suède, et dont le mérite est bien peu propre, dit-on, à le tirer de l’oubli, que doit aboutir le règne du roi de Suède actuel, long règne qui a été consacré tout entier à la prospérité du pays. La France n’a trouvé qu’un reproche à faire au roi Charles-Jean, c’est celui d’avoir été trop Suédois depuis son adoption par la Suède, et ce ne seront certainement pas les Suédois qui le puniront, dans la personne de son successeur, du dévouement absolu qu’il a montré à sa seconde patrie. Les bruits que nous relevons ne sont pas d’une extrême importance ; mais ils dénotent une activité nouvelle dans le parti légitimiste, qui espère vainement ressaisir dans les élections une position perdue, et cherche inutilement des points d’appui dans toute l’Europe.

Le ministère a bien fait de pousser avec énergie et persévérance les préparatifs de l’expédition de Constantine, pendant qu’on discutait les propositions d’Achmet-Bey. En effet, les négociations entamées avec lui ont été rompues au moment où l’on s’y attendait le moins, par un caprice inexplicable, si toutefois il n’est pas plus naturel de supposer que ce chef voulait gagner du temps et ne cherchait qu’à suspendre, par des offres trompeuses, les envois de troupes et de matériel en Afrique. Si c’était là son but, il l’a manqué complètement ; car, depuis quelques mois, on n’a pas perdu une minute pour assurer le succès de l’entreprise et pour être en mesure de commencer l’expédition dans la saison favorable. M. le duc d’Orléans a pris part aux derniers conseils tenus sur cette grande question, et on annonçait hier