Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 11.djvu/585

Cette page a été validée par deux contributeurs.
581
LES UNIVERSITÉS SUÉDOISES.

tous les paysans de la Scanie : personne ne put le lui dire. Il commençait à être inquiet, car l’église grandissait chaque jour à vue d’œil. Mais un soir qu’il passait dans la campagne, il aperçut une femme assise au seuil d’une maison avec un enfant. L’enfant pleurait, et sa mère lui dit : « Tais-toi, ton père Finn va venir, et il t’apportera le soleil et la lune ou les deux yeux de saint Laurent. » Cette fois le bon saint s’en retourne au ciel tout joyeux. Quelques jours après, le géant vint le sommer de tenir sa promesse. « Allons, Finn, dit saint Laurent, l’église n’est pas encore finie, plus tard nous verrons. » Quand le malheureux architecte entendit prononcer son nom, il se précipita dans la catacombe, et embrassa un des plus forts piliers pour le renverser ; sa femme et son enfant en firent autant, et le saint les changea en pierre. Ils sont restés là suspendus à leur colonne, et l’église du saint s’est élevée sur leur tête comme la religion du Christ sur les souches pétrifiées du paganisme.

L’université fut fondée en 1666. Le roi lui assigna la plus grande partie des biens qui avaient appartenu au chapitre de Lund et au clergé catholique : quatre paroisses, trente prébendes, neuf cents pièces de terre. Elle a gardé tous ces biens et les a sagement administrés. Le gouvernement n’entre que pour une faible part dans ses dépenses annuelles ; elle paie elle-même ses professeurs. Elle s’agrandit, elle fait bâtir, elle achète des propriétés, elle a ses registres en partie double comme un négociant, ses fermiers et son intendant comme un grand seigneur. L’intendant est élu par le consistoire et nommé par le chancelier. Il doit gérer les propriétés de l’université, percevoir ses revenus, et solder ses dépenses. Chaque année il est tenu de rendre rigoureusement compte de sa gestion. Une fois le calcul fait, ce qui reste en caisse est placé non pas sur les fonds de l’état, mais à six pour cent sur bonnes et loyales hypothèques. C’est ainsi qu’elle a amassé d’abord un capital inaliénable de 100,000 écus, et ce capital s’accroît sans cesse.

Les professeurs sont payés en nature, comme dans le vieux temps : les anciens reçoivent trois cents tonnes de grain, estimées à environ 4,000 fr. ; les plus jeunes reçoivent un peu moins. Les professeurs extraordinaires ont de 600 à 1000 fr. ; les privat-docent ne sont pas payés.

Les professeurs de théologie ont une cure. Quelques professeurs laïques en reçoivent une aussi comme récompense de leurs services. Ils sont obligés alors de se faire prêtres. Ils écrivent une dissertation latine qu’ils défendent en public, après quoi l’évêque leur donne l’ordination. Ils portent une redingote noire, une cravate blanche, un petit collet, et continuent à faire leurs cours. Un vicaire les remplace dans leur paroisse. Ils sont obligés seulement d’aller trois ou quatre fois par an visiter leur cure et prêcher. C’est la même organisation que celle de l’église anglicane, mais avec moins d’abus, car le même prêtre ne peut jamais être titulaire de plusieurs cures.

Il n’est pas rare de voir des professeurs nommés non seulement curés, mais évêques. Quand un siége épiscopal devient vacant, les prêtres de chaque district se réunissent chez le prost[1]. Chacun d’eux écrit sur un bulletin

  1. Prêtre de canton.