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REVUE ÉTRANGÈRE.

longs termes pour payer, et ils paient souvent en titres et créances de diverses natures et de diverses origines, sur le gouvernement, qui sont actuellement sans valeur, puisque les intérêts ne sont pas servis, et, pour un grand nombre de ces dettes, ne le seront peut-être jamais. Il y a telle propriété ecclésiastique vendue comme bien national dont le trésor n’a pas retiré, en capital réel, ce qu’il percevait sur elle chaque année, en droits et contributions de toute espèce, parce que ce genre de propriétés en acquittait de très considérables. L’avenir, nous le savons, nous l’espérons au moins, effacera les misères du présent ; mais le déficit s’accroît de jour en jour, on ne pourvoit à aucun service, le trésor ne remplit aucune obligation, tout manque à la fois.

M. Mendizabal, qui a épuisé toutes les ressources d’une imagination féconde en expédiens, et qui ne se laisse pas arrêter par de vulgaires scrupules, semble reconnaître aujourd’hui que ce système dilatoire est arrivé à son terme ; car depuis plus de trois mois il travaille à la conclusion d’un emprunt à l’étranger. Un riche capitaliste espagnol avait fait ou accepté des propositions pour un capital nominal de 800,000,000 de réaux (200,000,000 de francs), que diverses conditions auraient certainement réduit d’un tiers ; mais il demandait la garantie, au moins morale, des deux gouvernemens de France et d’Angleterre, qui l’ont refusée[1]. Cette négociation n’a donc pas eu de suites. Maintenant il est fortement question d’un autre emprunt moins considérable, qui se négocierait à Londres, et pour sûreté duquel le gouvernement espagnol offrirait les revenus de Cuba et de Porto-Rico. On assure que celui-là est en voie de réussir. Si cette combinaison n’est pas accompagnée de mesures propres à soulever, de la part de l’administration coloniale, une résistance qui serait difficile à surmonter, malgré ses inconvéniens, il faudrait l’accueillir. Elle en a certainement beaucoup moins que le projet d’un traité de commerce avec l’Angleterre, ou de concessions commerciales faites à cette puissance, par voie de réglemens douaniers, dont il a été aussi question, et au moyen desquels on obtiendrait d’elle un fort subside ; car non-seulement on devrait craindre alors que les tendances séparatistes de la Catalogne ne prissent un caractère sérieux, et n’entraînassent Valence par la communauté d’intérêts ; mais la France ne pourrait, ce nous semble, tolérer des arran-

  1. Les différends survenus entre M. de Campuzano, ministre d’Espagne à Paris, et le gouvernement français se rattachent à cette affaire, que M. de Campuzano avait eu le tort de ne pas vouloir traiter dans les formes accoutumées.