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Nous avons assisté, en différens pays, à des fêtes royales justement vantées, à des banquets de cour dignes des plus grandes cours, jamais une pareille recherche, une si énorme abondance, une telle perfection des détails, ne s’étaient offertes à nous.

Après le banquet, a eu lieu la réception du corps diplomatique ; puis le roi a traversé tout le château, et s’est rendu solennellement à la salle de spectacle, éclairée, dorée et décorée avec une splendeur inouie. Il faut encore désespérer de rendre l’effet de ce public couvert d’ordres, de broderies d’or et d’argent, de ces femmes chargées de diamans, dont des glaces immenses reflétaient l’éclat dans cette salle de Louis XIV, où brillaient les armes du grand roi, soutenues par deux gigantesques figures d’anges dorées, étendues sur des nuées d’argent. Plusieurs fois le spectacle a été interrompu par des cris spontanés d’enthousiasme adressés au roi, qui en paraissait vivement ému. Il était trois heures du matin quand se termina la promenade aux flambeaux, dans les appartemens, qui mit fin à cette fête unique. Le lendemain, un feu d’artifice illuminait le parc et toute la forêt voisine, tandis que le château de Versailles apparaissait sur la hauteur, au milieu d’un nuage de feu qui en dessinait les moindres contours. Plus de trente mille personnes, accourues de Paris et des campagnes environnantes, assistaient à cette nouvelle inauguration.

Tandis que le roi employait si dignement sa fortune à faire revivre toute une cité, ensevelie, comme Herculanum, sous les cendres du passé, et qu’il appelait tous les représentans de la France à partager ses nobles plaisirs, le ministère s’occupait des intérêts de quelques millions de Français qu’on ne pouvait tous convier aux fêtes de Versailles, il faut en convenir. Plusieurs projets de loi se votaient à la chambre, tous destinés à des améliorations locales et à de grands travaux dans les départemens. Ainsi les ports de Dunkerque, de Calais, de Boulogne, de Tréport, de Granville, de Saint-Malo, de Landernau, de Lorient, de la Ciotat, de Cannes, vont être perfectionnés ; six millions ont été affectés à ces travaux. Trois millions seront employés à améliorer le port de Honfleur, le canal si intéressant et si utile de Caen à la mer, le port de Dieppe et celui de Port-Vendres ; deux millions sont donnés pour le perfectionnement de la navigation de la rivière de l’Aa et des ports de Palais et de Bourbourg ; sept millions sont destinés au perfectionnement de la navigation de la Meuse depuis Sédan jusqu’à la frontière de la Belgique ; une somme de 11,700,000 fr., est consacrée à l’établissement de deux canaux latéraux à la Marne, etc., etc. La richesse territoriale de la France doublera quand elle aura ainsi acquis les voies de communication qui lui manquent, et ses ressources commerciales augmenteront dans une proportion égale ; les travaux même répandront l’aisance dans les classes inférieures, qu’il est si urgent de secourir, et féconderont déjà les départemens avant même que les grands résultats qu’on attend de ces travaux soient obtenus. Le ministère de l’amnistie complète ainsi son ouvrage et prouve qu’il entend bien sa mission. C’est ainsi que, parmi toutes les faveurs distribuées à l’occasion du mariage de M. le duc d’Orléans, nous le féliciterons particulièrement d’avoir accordé la croix de la Légion-d’Honneur à M. Henri Fournel, ingénieur des mines, pour un utile ouvrage, intitulé ; Étude des