Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 10.djvu/822

Cette page a été validée par deux contributeurs.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.
Séparateur



14 juin 1837.



Au moment où nous écrivons, les fêtes de Versailles ont déjà leur retentissement dans toute la France. Elles ont dépassé en somptuosité tout ce qu’on pouvait attendre. Les détails de ces fêtes sont partout. L’hospitalité royale, qui avait éclaté déjà avec tant de magnificence depuis quelques années, aux Tuileries et à Fontainebleau, s’est montrée là si large et si complète, qu’il faut renoncer à en donner une idée, à moins de se livrer à une description qui serait tout un livre.

D’abord l’hôte royal avait, en quelque sorte, créé le lieu de la fête. Depuis six ans, au milieu des émeutes, des tentatives d’assassinat, des embarras sans nombre du dedans et du dehors, des changemens ministériels, à travers les innombrables soins de sa tumultueuse royauté, le roi poursuivait patiemment l’œuvre de la régénération de Versailles. Au risque d’augmenter ses dangers, le roi y allait sans cesse, voyait tout lui-même, ordonnait, dirigeait les travaux, les faisait recommencer souvent, les détruisant quand ils étaient mesquins, indiquant lui-même la place des tableaux, marquant la division des salles, et faisant tout concourir, sous son œil régulateur, au plan qu’il avait conçu. Que l’on compte les heures de travail données par le roi depuis six années à ses ministres, les devoirs divers qu’il se plaisait à remplir, les voyages, les revues, les visites aux monumens publics, les audiences, les négociations ; qu’on imagine une vie si bien remplie, et qu’on vienne ensuite à Versailles, voir quel en a été le délassement ! Une œuvre devant laquelle avaient reculé Napoléon et les deux souverains qui lui ont succédé : la restauration du palais de Versailles, où l’on voulait tantôt transporter les Invalides et tantôt les malades de l’Hôtel-Dieu ! Le palais de Versailles, dont on voulait faire une caserne ou un hôpital, est aujourd’hui plus brillant et plus digne d’un roi qu’il ne l’était du temps de Louis XIV, et ceci est l’ouvrage d’un roi constitutionnel. Il y aura de grandes choses à dire un jour d’un roi qui a donné la paix à la France et à l’Europe, et qui utilise ainsi les loisirs de cette paix. Encore quelques années de ce règne, et la France aura vu se relever tous les anciens monumens, comme elle a déjà vu terminer tous les nouveaux. Chaque jour amène et fait éclore d’utiles et de grandes pensées. En même temps que l’on couvre d’or Versailles, on s’occupe de couvrir nos routes de fer, de rendre nos rivières plus navigables et d’augmenter le nombre des canaux. La restauration de Versailles tient donc à tout un ordre de pensées conçues pour augmenter la prospérité et l’éclat de la France ; l’envisager autrement, ce serait rétrécir l’idée qui a pré-