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POÈTES ET ROMANCIERS DU NORD.

qui d’une main affaiblie par l’âge cherche à soutenir encore l’autel chancelant des dieux scandinaves ; de l’autre, Olaf, qui s’avance avec tous les prestiges d’une royauté naissante, pour renverser les vieilles idoles et propager le christianisme. C’est un monde ancien qui s’en va. C’est une ère nouvelle qui commence. Chacun court au-devant du jeune roi, et Hakon est abandonné par ses amis, trompé par ses confidens, trahi par ses esclaves. Une femme lui reste fidèle : c’est la femme qu’il a maltraitée et chassée de chez lui. Quand il a combattu contre Olaf et perdu la bataille, il est seul, sans force, sans espoir, obligé de fuir. Il s’en va chez Thora, et Thora l’accueille, l’embrasse et oublie toutes les injustices d’autrefois, pour ne songer qu’à son amour. Olaf est proclamé roi. Hakon est tué par un de ses esclaves dans la caverne où il a cherché un refuge, et Thora vient s’enfermer avec lui ; elle pose une épée à ses côtés, une couronne sur sa tête :

« Oh ! je t’aime, lui dit-elle, je t’aime dans la mort comme dans la vie. Naguère encore, tu étais semblable au soleil qui prête sa lumière à tout ce qui l’entoure. Maintenant le peuple t’a abandonné pour rendre hommage à un autre soleil. Auprès de toi, il n’y a plus qu’une pauvre femme qui te regarde avec douleur. C’est elle qui te rendra les honneurs que les autres ont oublié de te rendre. Reçois cette couronne funèbre des mains de Thora, et puis dors bien, Hakon Jarl, dors bien. Je fermerai moi-même cette porte, et quand on viendra l’ouvrir, on emportera le corps de Thora pour le placer auprès du tien. »

Œhlenschlœger a écrit sur ce même Olaf une autre tragédie dont il a bien voulu nous communiquer le manuscrit. C’est le tableau d’une époque de troubles religieux et d’agitations politiques dans le Nord. Hakon est mort ; Olaf est roi. Le paganisme est aboli, et l’autel du Christ s’élève sur les débris du temple d’Odin. Mais des hommes inquiets se révoltent contre le nouveau culte et contre le nouveau roi. Olaf engage avec eux le combat. Il est tué. Sa mort réconcilie les partis, apaise les dissensions, et ceux qui avaient pris plaisir à le braver l’invoquent sous le nom de saint Olaf. Cette tragédie forme le complément du cycle historique dont le poète a retracé les principales phases. Elle sera jouée l’hiver prochain. Les critiques qui en ont entendu la lecture lui prédisent du succès.

Œhlenschlœger, dans ses travaux dramatiques, ne s’est pas ar-