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mette de juger, à la vue d’un caractère symbolique, quel est, de tous les rôles divers dont il peut être chargé, celui qu’il remplit dans la circonstance présente, c’est-à-dire à une méthode devant laquelle disparaîtraient toutes les difficultés. Puis donc qu’il y a eu méprise, puisque la méthode qui devait assurer la solution complète du problème n’est point encore trouvée, il faut nous résigner à sacrifier une partie des trop grandes espérances que nous avions conçues d’abord ; mais nous devons nous estimer heureux si l’on nous démontre les principes au moyen desquels nous connaîtrons d’une manière certaine le sens attaché aux caractères non symboliques, qui entrent, dit-on, pour les deux tiers au moins dans toute légende hiéroglyphique.

Je ne m’arrêterai pas long-temps au deuxième des importans chapitres que M. Salvolini voudrait ajouter à la grammaire hiéroglyphique. M. Champollion ne reconnaissait que deux grandes classes de caractères, les caractères signes de sons et les caractères signes d’idées. M. Salvolini veut nous faire admettre une troisième grande classe de caractères qui, dit-il, ne représentent ni des sons ni des idées. Que représentent-ils donc ? Eh ! mon Dieu ! ils ne représentent rien. M. Salvolini les appelle signes ou groupes explétifs-disjonctifs, ce qui veut dire, en termes vulgaires, caractères inutiles, groupes superflus. Mais comment a-t-il reconnu cette superfluité, que, suivant lui, M. Champollion a toujours ignorée ? Ce n’est, malheureusement, qu’à l’aide de sa conviction intime et du sens général de ces textes inconnus dont j’ai déjà parlé, lequel s’opposait sans doute invinciblement à ce que ces signes eussent quelque utilité. Il faut dire, il est vrai, qu’une traduction grecque peut bien nous mettre sur la voie du sens de tel caractère hiéroglyphique, mais qu’il serait fort difficile peut-être d’établir, au moyen de cette traduction, que tel caractère n’a aucun sens. Parmi les signes de cette classe nouvelle, découverte par M. Salvolini, il y en a qui, selon lui, s’employaient par respect, d’autres que l’on traçait dans l’intérêt de l’euphonie, d’autres encore, et ce ne sont pas les moins curieux, qui n’avaient pas d’autre usage que de remplir les vides, en un mot, des signes employés par horreur du vide. L’on ne s’attendait guère à voir reparaître aujourd’hui dans les sciences ce fameux principe de l’horreur du vide, qui a joué jadis un si grand rôle dans la physique. Chassé par une porte, il