Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 10.djvu/746

Cette page a été validée par deux contributeurs.
736
REVUE DES DEUX MONDES.

adhérens. On sait qu’en Chine elle est une des trois religions de l’empire ; les deux autres sont le déisme de l’école de Confucius et le bouddhisme.

La Chine est un monde séparé du nôtre. Il n’en est que plus intéressant de relever le petit nombre de points par où les annales de cet empire, qui se croit l’empire du milieu, et qui est à l’une des extrémités de l’univers, touchent à l’autre bout de la terre ; trouver dans les annales chinoises quelques renseignemens sur les origines des populations germaniques, sur la grande émigration de peuples dont le dernier contrecoup a produit l’invasion des Barbares dans la Gaule au ve siècle, n’est-ce pas un des résultats les plus inattendus, une des surprises les plus piquantes que la science puisse offrir à la curiosité ? Deguignes le premier a tenté d’éclaircir ainsi l’histoire de l’Occident par des renseignemens puisés aux sources les plus lointaines. Malheureusement, sa donnée fondamentale reposait sur une identité que la science conteste aujourd’hui, l’identité des Huns et des Hioung-nou, dont parlent les historiens chinois. Celle que MM. Rémusat et Saint-Martin ont cru reconnaître entre les Yue-ti et les Gêtes, les O-si et les Ases, soutiendra-t-elle mieux la critique ? Je n’oserais l’affirmer. Les cheveux blonds que les historiens chinois attribuent à ces peuples sont la seule raison un peu considérable qu’on puisse avoir de les rattacher à la famille germanique. La ressemblance des noms est bien quelque chose ; mais le génie monosyllabique de la langue chinoise et le défaut dans cette langue de plusieurs articulations, par cela même qu’ils rendent possible le rapprochement de mots assez différens, empêchent d’y ajouter une foi complète. Comment être sûr que Yue-ti est la transcription chinoise du nom des Gêtes ? Mais, d’autre part, comment le nier avec certitude, quand on voit les missionnaires qui ont traduit la Bible en chinois, ne pas trouver dans les ressources vocales de cet idiome d’autre manière d’écrire Abraham que A-pou-la-mou ?

Cependant, l’accord sur ce point des hommes que j’ai nommés, les plus compétens en cette matière que le siècle ait produits, cet accord est d’un grand poids. En outre, cette supposition est conforme à toutes les vraisemblances, puisqu’elle montre les populations mères des nations germaniques aux lieux où toutes les