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REVUE DES DEUX MONDES.

Cippes funéraires peints trouvés au Pirée.

Depuis la publication du Jupiter Olympien de M. Quatremère de Quincy, toutes les questions relatives à la sculpture et à l’architecture polychromes, chez les anciens, ont vivement préoccupé les antiquaires et les artistes. Récemment, une branche importante de l’histoire de l’art, l’emploi de la peinture monumentale, a été l’objet d’une discussion animée entre deux antiquaires français. Nous avons pensé que nos lecteurs nous sauraient gré de leur présenter la traduction d’une lettre écrite d’Athènes au rédacteur du Kunstblatt par M. L. Ross, savant archéologue allemand, conservateur des monumens antiques à Athènes, et qui a présidé à un grand nombre de fouilles exécutées dans cette ville, au Pirée, et en plusieurs autres lieux de l’Attique. Cette lettre contient l’annonce d’une découverte qui promet de jeter beaucoup de jour sur l’ancienne lithochromie, c’est-à-dire, l’usage de colorier la pierre même des monumens, et d’y exécuter des peintures.

« La forme la plus ordinaire des pierres sépulcrales est, comme on sait, celle d’un cippe allongé, légèrement pyramidal, couronné par une espèce de fronton ou aëtoma. Ce fronton est orné tantôt d’une simple palmette, tantôt (dans les cippes plus grands) d’un feuillage très richement travaillé et presque de haut relief. Au-dessous de la petite corniche qui sépare le fronton de la surface inférieure du cippe, se plaçaient un ou plusieurs noms, séparés l’un de l’autre par deux rosaces ; sous les noms, se trouve très fréquemment un bas-relief représentant le défunt ou les défunts en diverses actions ; c’est communément une scène d’adieux et de séparation d’avec les survivans. Il s’est conservé une multitude de ces monumens, plus ou moins ornés, parce que, même dans le temps du plus grand mépris pour l’antiquité, les prêtres, les citadins et les paysans, séduits par la délicatesse du travail de ces tombeaux, les ont recueillis et encastrés dans les murs des églises et des maisons.

« Pendant un long séjour dans l’Attique, mes amis et moi nous avons été fréquemment surpris de voir des cippes, principalement de petite dimension, dans lesquels, non-seulement l’aëtoma, mais toute la surface, jusqu’à l’inscription, étaient entièrement polies. Plus notre attention avait été éveillée sur l’application des couleurs dans l’architecture grecque, plus nous mîmes de zèle à rechercher de tels cippes. Nous y trouvâmes fréquemment des ornemens polychromes, tels que palmettes et fleurs sur le fronton, oves et feuilles sur le bourrelet placé au-dessous… Mais la surface inférieure, laissée vide, restait pour nous un problème. Enfin nous découvrîmes, dès 1833, au Pirée, une pierre sépulcrale du même genre, sur la surface de laquelle se voyaient distinctement les contours et les restes des couleurs d’un groupe de trois figures peintes sur le marbre poli. Cette pierre se conserve maintenant dans le temple de Thésée. Plus tard, nous trouvâmes à Syros deux pierres semblables, apportées de Rhénéa, où l’on apercevait des figures, mais moins distinctement. Je donnai alors dans cette feuille quelques renseignemens sur cette classe, nouvellement découverte, de monumens sépulcraux. Mais notre attention fut bientôt détournée de cet objet.