Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 10.djvu/483

Cette page a été validée par deux contributeurs.
473
LA PRESSE FRANÇAISE.

dre comment Auguste était maître absolu de l’empire, en ayant soin de toucher le moins possible aux anciennes formes républicaines. Il attribue (et en cela il émet une opinion particulière) la plus grande part de ce pouvoir impérial aux droits de la puissance tribunitienne qu’exerçaient, avec un surcroît de plénitude, Auguste et ses successeurs. Parmi les jugemens qui touchent les personnages, on remarquera ce qu’il y a d’assez nouveau dans l’appréciation du caractère de Claude, que M. Cayx n’a pas eu d’ailleurs la prétention de réhabiliter le moins du monde : il laisse aux Linguet ces ressources du paradoxe. Pour lui, il ne marche qu’appuyé sur Tacite, Suétone et les autorités antiques, et sur les modernes comme Tillemont, dans cette voie romaine si large, et toutefois si encombrée, où a déjà fait route le grand historien Gibbon, qu’il ne cite peut-être pas assez souvent. Ce premier volume achevé et la juste estime qui s’y attache doivent engager fortement M. Cayx à poursuivre.

L’Orient a cessé d’être pour nous le pays des illusions. Un jour viendra où son histoire véritable sera plus connue et mieux comprise en Europe que parmi les populations inertes qui couvrent le sol asiatique. L’honneur de ce résultat sera dû particulièrement au comité de traductions, dont le siége est à Londres, mais qui recherche la coopération de tous les philologues étrangers. Sa collection vient de s’enrichir de deux publications récemment faites en France. Une volumineuse compilation, semblable à celle que nos pères appelaient avec une emphase orientale, la mer des histoires, la chronique d’Abou-Djafar-Tabari, l’oracle de l’Asie au ixe siècle, est devenue célèbre dans les contrées musulmanes, et s’est multipliée depuis en plusieurs dialectes. Une version abrégée, écrite en langue persane par le visir d’un prince samanide, est enfin reproduite en français par M. Louis Dubeux, qui a corrigé les altérations du texte, en rapprochant dix manuscrits de la Bibliothèque du Roi. La première livraison, conduisant de la création aux patriarches, présente une confusion des traditions sémitiques, où domine cependant la Bible des Hébreux. À vrai dire, elle est d’un médiocre intérêt, si ce n’est pour ceux qui veulent démontrer scientifiquement une révélation primitive, en établissant la conformité de toutes les anciennes traditions. Mais les volumes suivans, consacrés à la Perse ancienne, à Mahomet et à ses premiers successeurs, auront une valeur historique, et même une sorte d’originalité, grace au traducteur qui conserve heureusement le génie oriental, sans sacrifier la netteté qu’exigent les lecteurs français.

Les hommes des temps héroïques revivent dans les Lettres sur l’Histoire ancienne des Arabes[1], par M. Fulgence Fresnel. Ce sont les on

  1. Chez Benjamin Duprat, libraire de la Société orientale, rue Hautefeuille, 28.